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1 mai 2015 5 01 /05 /mai /2015 17:32
"Par dessus l'épaule de Dieu"

Dans l’avion qui me ramenait de Bordeaux, assis à côté d’un passager qui venait de commander, en fin de matinée, un jus de pomme avec biscuit sucré, alors qu'il s'était agi pour moi d'un jus de tomate accompagné de salé, me confortant dans l’idée qu’ il y avait bien deux mondes, j'ai eu le loisir terminer le dernier roman de Jérôme Ferrari " le principe" , prix Goncourt pour son précédent, biographie imaginaire du prix de Nobel de physique Werner Heisenberg, un des pères fondateurs de la mécanique quantique, qui énonça le fameux principe d’incertitude selon lequel on ne peut déterminer avec une précision absolue à la fois la vitesse et la position d'une particule élémentaire, ouvrant ainsi la voie à une révolution théorique sans doute encore plus fondamentale que celle de la relativité générale. Roman philosophique en forme d'interpellation du physicien sur sa vie, par un jeune étudiant en philosophie qui n'est autre que l'auteur : comment celui qui a tenté de regarder « par-dessus l'épaule de Dieu » en réussissant à lever le voile sur la façon dont se comporte l’infiniment petit, a-t-il pu montrer tant de complaisance envers le régime nazi en acceptant de participer au programme nucléaire du Reich? Comme si, par une généralisation du dit principe, une plus grande lucidité dans un domaine, ici celui du monde atomique, était corrélée à un aveuglement dans un autre, là le problème du mal, aveuglement dont le film "Le labyrinthe du silence" nous révèle que nombre d'allemands auraient préféré voir échapper au devoir de mémoire. Ce grand roman, écrit superbement, demande cependant pour en savourer toutes les nuances, un minimum de familiarité avec les concepts de la mécanique quantique…

Si les grands textes religieux sont censés nous délivrer « la parole » de Dieu, son interprétation se fait aussi «par-dessus son épaule». Le regard que porte un réalisateur originaire du monde musulman sur l’évangile, en ces temps où nombre de chrétiens y sont persécutés, à travers le personnage de Judas, est un des plus originaux depuis le film de Pasolini « l’évangile selon Saint-Mathieu ». Derrière une réhabilitation de Judas, qui ne serait pas le traître colporté par la mémoire collective, mais un disciple fidèle, trop peut-être, « Histoire de Judas », nous donne un version très réaliste de l'évangile, filmée avec une grande simplicité, peu de dialogues - à l’exception de la scène fascinante de la confrontation entre Jésus et Pilate-, peu d’épisodes relatés, mais exemplaires comme celui des marchands du temple, ou surtout celui de la femme adultère en raison des origines arabes de l’auteur. Un très beau film.

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