Depuis plusieurs années, Bertrand et moi, avons l' habitude de faire plusieurs étapes, à l'aller ou au retour (voire les deux), dans quelques uns des plus
beaux villages ou sites de France sur le chemin de Sitges, étapes qui jouent, en quelque sorte, le rôle de "chambre de décontamination" avant que nous n'atteignions notre "Compostelle "
gay. Cette année, Saint Cirq La Popie, petit village du Lot, désigné comme « plus beau village de France » lors d’une récente émission de France Télévision, à peine quelques jours après que
j’eusse fait ma réservation, est notre première halte sur la route de notre « Compostelle » gay. J’avais découvert ce joli site il y a 14 ans, avec mon précédent ami qui m‘avait quitté un an
plus tôt - pour la nième fois il tentait, par un improbable retour, de savoir de quel manque il souffrirait le moins, du mien ou de celui pour lequel il était parti - revenant d’un
séjour dans l’hôtel restaurant de Michel Bras à Laguiole,souvenir plutôt douloureux.
Nous ne nous attendions pas à trouver si peu de monde en plein mois d’août dans la vallée du Lot-Celé et de pouvoir visiter presque seuls ces petites merveilles que
constituent les vestiges de l’ancienne abbaye de Marcilhac-sur-Célé ou du prieuré d’Espagnac -Sainte-Eulalie, prieuré que nous fit ouvrir et visiter, en dehors des rares heures prévues à cet
effet, une ahurissante vieille dame, gardienne des lieux, dont l’humour le disputa à l’érudition, sur la sollicitation insistante d’un jeune touriste accompagné de son épouse et de sa mère(« je
suis élève de l’école du Louvres ») , qui se vit répondre : « si j’accepte de vous faire cette visite jeune homme, qui je vous en avertis durera au moins trois quart d’heures et vous coutera deux
euros par personne, ce n’est pas en votre qualité d’élève de cette école, je n’en ai rien à faire, mais parce que, avec ces deux messieurs, vous êtes cinq ». A notre interrogation sur la faible
fréquentation de ce lieu elle s'exclama : "Qui s'intéresse encore à culture, qui plus est à la culture religieuse!". Durant la visite, nous rappelant pourquoi les « gisants » étaient toujours
représentés jeunes, à l’âge de la mort du Christ, elle se retourna vers moi : « Ca doit vous réjouir, Monsieur, d’apprendre que vous n’aurez que 33 ans lors de votre résurrection… ».
Je ne suis pas sûr que la jeunesse soit une condition suffisante (ni nécessaire) pour trouver dans cette région une âme
gay disponible à une distance raisonnable, une des rares détectable par « Grindr » ne se trouvant qu’à plus de quinze kilomètres! Nous atteindrons Sitgès mercredi, après deux nouvelles étapes à
Saint Bertrand de Comminges puis à Villefranche-de-Conflent, pour en repartir le 16. Nous avions envisagé de rompre avec nos habitudes aoutiennes et d’accompagner , pour découvrir enfin Mykonos
qui constitue encore une lacune dans ma culture gay, un couple de nos amis habitué de cette destination nettement plus onéreuse, mais ceux-ci ayant du renoncé à de nouvelles dépenses à la suite
de l’achat de leur appartement, il nous a semblé financièrement plus judicieux d’attendre que la Grèce ne sorte de l’euro ….
Saint-Cirq n’était pas tout à fait notre première étape puisque nous avons passé quarante huit heures à Bordeaux, le temps d’aller esquisser notre bronzage sur la
plage gay du Porge, elle aussi bien peu fréquentée en ce vendredi pourtant très ensoleillé. Le soir, le « Gowest » se trouvant fermé pour congés annuels, nous sommes allé boire un dernier verre
au « Trouduc », dont le nom même témoigne , au même titre que l’ambiance musicale qui y règne et le look de sa clientèle, de la momification dans les années 70 d’une certaine homosexualité
provinciale
(La photo d'illustration de ce billet est celle du prieuré d'Espagnac