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12 mars 2010 5 12 /03 /mars /2010 19:36

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Il y a déjà quelque temps  le journal en ligne de Tetu avait consacré un article au suicide par pendaison d’un jeune détenu incarcéré pour la 2è fois et qui était terrorisé à l’idée de subir à nouveau des vexations homophobes, m’a remis en mémoire un triste épisode de ma vie sentimentale, un de ces épisodes où l’on se dit à posteriori « si j’avais su », mais il était trop tard.


Cette histoire a débuté à la fin de l’année 81, mon aventure avec Pierre Jean que je vous ai conté dans un précédent billet venait de se terminer. Je vivais mal cette rupture, comme toutes les ruptures d’ailleurs, et je réagissais à ces situations par une accentuation de mon vagabondage sexuel. Lors d’un de mes sorties en boîte, quelques jours plus tard, j’ai été invité à plusieurs reprises pendant « la danse du tapis » (très en vogue, tout au moins en province, à cette période) par un jeune homme, aussi mignon qu'efféminé, excentrique même, une folle en un mot, qui était connu dans le « milieu » bordelais sous le pseudo de «Ginette ». Je ne l’aurais sans doute pas amené chez moi si mon état psychologique avait été autre (l’alcool aidant..), d’autant plus que je le soupçonnais, à tort, d’être une petite « pute ». Je ne l'ai pas regretté, il était charmant, des traits très fins, féminins certes, un corps d’éphèbe comme je les aimais en ces temps là, 18 ans. Il m’a dit n'avoir pas connu ses parents et vivre chez un couple qui lavait adopté. Je soupconnais une origine kabyle. L’ayant revu une ou deux fois, après l’avoir amené au restaurant (et affronté pour la 1é fois le regard de toute une salle se retournant lors de notre entrée, la discrétion n'était pas son fort et prenais plaisir à en rajouter), nous avons eu en rentrant un grave accident de voiture (j’avais brûlé un feu que je n’avais pas vu). Comme il saignait abondamment du nez, un des témoins l’a amené à l’hôpital pendant que je réglais la situation avec le propriétaire de la voiture qui m’avait percuté (une chance que ce dernier ait été compréhensif et que nous ayons pu éviter l’arrivée de la police et la prise d'une alcoolémie qui aurait été sans doute "limite"….les deux voitures étaient bonne pour la casse…). Il n’avait en fait qu’une fracture du nez (et moi d’une côte dont je ne me suis aperçu que la nuit suivante en faisant l’amour avec lui), mais cet épisode nous a rapproché et nous nous sommes vu de plus en plus souvent. J’aimais son corps, sa compagnie, son humour ravageur (ah l’humour « folle » !), il me faisait rire si souvent, mais cette histoire ne me paraissait pas pouvoir aller bien loin, d’autant plus que je ne l’avais jamais vu jouir (je n’arrivais manifestement pas à le satisfaire) et  je n’en étais pas amoureux. Mais mon entourage, amis, frère, une fois passé l’étonnement de me voir avec un tel personnage (mon frère m’avait lancé « je croyais que tu n’aimais pas les femmes »), se sont attachés à lui et m’ont ouvert les yeux sur le problème sexuel en me disant que si je réfléchissais un tant soit peu, je trouverais la solution tout seul. En effet c’était simple, il suffisait de l’enculer (la sodomie n’a jamais été pour moi indispensable à un acte accompli, et jusque là ce n'était pas en tant qu’actif que je j'étais le plus performant). J’ai donc fait mes gammes et j’ai enfin eu la satisfaction de le voir prendre son pied.
Quoiqu’il en soit, il s’est peu à peu installé chez moi sans que je l’en dissuade alors que je savais que j’y mettrais fin un jour ou l’autre. J’y étais bien sûr attaché, mais la vie n’était pas simple avec lui. Je crois que c’est le seul être sur lequel j’ai porté un jour la main, une paire de gifles, pour mettre fin à une crise d’hystérie (il me menaçait de se jeter par la fenêtre après que je l’ai eu surpris en train de se faire « troncher » sur le parking d’une boîte et que je lui ai dit qu’il valait mieux en rester là). Je n’étais peut être pas suffisamment « libéré » pour affronter sans arrêt le regard des autres quand nous nous promenions dans la rue (il portait toujours des tenues impensables !), me surprenant parfois à me tenir légèrement en retrait…Il était si « visible » et en même temps provocateur, sans conscience des risques qu’il prenait : il a été à plusieurs reprises  victime d’agressions homophobes, coup de ciseau dans un parc, battu à coup de pied sur une place de drague, rentrant à la maison une canine traversant sa lèvre inférieure, et j’ai du le faire accompagner plusieurs fois aux urgences de l’hôpital. Mais il s’agissait de l’hôpital où je travaillais, je le faisais amener par des amis et notamment Pierre Jean (qui était entre temps redevenu mon amant, la vie est compliquée…), qui me racontait les scènes épiques avec le personnel soignant qu’il faisait tordre de rire ("dois je enlever mes faux ongles et mes faux cils" et autres plaisanteries de ce type). Bien que je lui ai dit à plusieurs reprises qu’entre nous il ne s’agissait que d’une aventure, que cela ne pouvait s’éterniser, il me considérait en fait comme son "ami " et me présentait à ses copains (tous très jeunes également et qui tentaient de me séduire dès qu’il avait le dos tourné) comme son «mari» ce qui m’exaspérait.
Un jour cependant, par sa faute, du fait d’un absentéisme trop fréquent, il a été licencié (il était ce qu’on appelle, si je m’en souviens, patronnier-modéliste). Je ne pouvais accepter qu'il ne travaillât pas et je lui ai demandé de s'activer pour retrouver un travail. Sans résultat. Je n’arrivais cependant pas à le mettre à la porte. J’ai du m’y résoudre, ce qui me déchira car j’avais une immense affection pour lui, quasi paternelle, quand j’ai rencontré Bernard2, le début d’une aventure qui allait durer 15 ans.
Il a réagi sans un mot, pris ses affaires et dit qu’il repartait chez ses parents « adoptifs ». J’ai du alors affronter les reproches, si ce n’est l’hostilité, de tous mes amis, mon frère, et même de ma concierge qui ne voulait même pas adresser la parole à Bernard2. Je n’avais pas conscience qu’on l’appréciait à ce point là, y compris les voisins. J’ai appris par la suite qu’il avait rodé plusieurs jours autour de la résidence, racontant aux voisins et à la concierge ses infortunes.
Mais je ne le rencontrais plus dans le milieu bordelais et il ne me donnait aucune nouvelle.
Deux ou trois mois plus tard j’ai reçu un appel téléphonique d’une avocate parisienne, commise d’office, et qui m’annonçait que Michel était en prison. Il avait volé le chéquier d’un amant de passage et dépenser près de 50.000 francs en « fringues ». Il m’avait menti (il était mythomane, je ne m’en étais pas aperçu, j’ai su par la suite qu’il disait autour de lui vivre dans un appartement dont les murs étaient recouverts de feuilles d’or …En fait il n’avait pas de parents « adoptifs », seulement une sorte de gardienne qui ne l’a pas repris car il avait disparu trop longtemps, et il s’était retrouvé à la rue….).
J’ai tout de suite imaginé ce qui allait arriver et me suis demandé comment un juge avait pu être assez criminel, pour un acte certes répréhensible, mais pas à ce point, pour le mettre en prison et le livrer à la meute. Ce qui devait arriver arriva, il se fit violer, et même « maqué » par un gardien de prison. Heureusement il le dénonça, et on le fit sortir au bout de 6 mois, pour le placer dans un centre de réinsertion, près de Bordeaux. Les sorties étant autorisées, B
ernard2 qui se sentait aussi coupable que moi accepta qu’on le reçoive chaque fois que possible et nous l’amenions dans nos sorties. Les photos ci-jointes sont celles du réveillon qui a suivi sa sortie. Par la suite, il a rencontré quelqu’un de nettement plus âgé que lui et avec qui il semblait avoir retrouvé cette sensation d’un « chez soi » qu’il avait eu avec moi. Je l’ai aperçu à Paris il y a plus de 10 ans, toujours aussi star, dans une allée des Galeries Lafayette, puis je l’ai perdu de vue. Je ne l’ai pas abordé, je ne sais pourquoi. J’ai eu tort, je n’ai plus jamais eu de nouvelles. Il a 46 ans aujourd’hui, si le virus l’a épargné. J’aimerai tant savoir ce qu’il est devenu.

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