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1 avril 2013 1 01 /04 /avril /2013 22:14

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Nous sommes arrivés à San Diego pour la saint Patrick, une fête très célébrée en cette ville, ce qui me permis de la découvrir pour une fois animée, au moins l' espace d' un week-end, par une douce température dont on rêverait a Paris. Le plaisir aussi de voyager pour la première fois sur l’impressionnant A380. Celui aussi de d'explorer, comme à chacun de mes voyages, le fonctionnement des réseaux sociaux : à part Grindr, les plus populaire semblent Jack'd - qui n'est pas ici comme en France principalement réservé aux amateurs d'yeux bridés -, puis Manhunt, a4a et Scruff,  étonnamment gayromeo est déserté.

Pendant ce temps, la deuxième saison des Borgia débutait sur canal plus. Nul doute qu’elle aura le même succès que la première, tant le Vatican fascine et alimente tous les fantasmes. Ces dernières  semaines, depuis l’annonce étonnante de la renonciation de Benoît XVI, nous en ont donné un exemple saisissant,  les rumeurs les plus folles qui ont circulé, comme celles extravagante d’un lobby gay au Vatican... On pourrait se demander pourquoi ces fantasmes touchent si souvent au sexe, alors que les autres religions semblent épargnées ? Faut-il en chercher l’origine dans  la place faite à  la morale sexuelle dans le dogme, dans l’imaginaire qui s’est construit sur les costumes sacerdotaux et notamment la soutane, dans les pratiques homosexuelles récurrentes dans le clergé - reconnues par l’Eglise elle-même puisqu’elle tente d’en limiter la propagation en interdisant aux personnes à tendance homosexuelle à entrer dans les ordres – souvent diabolisées en les requalifiant à tort de «pédophiles»?

L'élection d'un nouveau Pape suscite toujours l'espoir de changements révolutionnaires. Celle-ci a occupé les médias pendant des semaines, sans doute jusqu'à l'indignation pour les "bouffeurs de curé" et l'indigestion pour bien des non croyants. La doxa "politiquement correcte" n 'a pourtant, ces dernières années, cessé d'essayer de nous convaincre que l'Europe n'avait pas de racines chrétiennes, on a du mal à imaginer ce qu'il en aurait été si elle en avait! Changements révolutionnaires?  Deux ouvrages dont le Monde s'était fait l'écho, il y a quelques mois, ont souligné le caractère subversif du christianisme: "Les voix de la Foi, vingt siècles de catholicisme par les textes "  et "L'anarchisme chrétien" ( qui tente de montrer que depuis deux siècles le christianisme a fondé l'anarchisme) . Les auteurs, François Huguenin pour le premier, Jacques Guillebon et Falk Van Gaver pour le second, s'attachent à démontrer que si l'Evangile est révolution c'est sur la plan social, en ce sens qu'il invite à résister à la loi du plus fort et à la loi du nombre, "qu'il subvertit les lois humaines" : "Que le riche et le patron se souviennent qu'exploiter la pauvreté et la misère et spéculer sur l'indigence sont choses que réprouvent les lois divines et humaines" (Léon XIII).
 Il est vrai que la séquence que nous venons de vivre a un parfum de révolution : renonciation de Benoit XVI, qui nous rappelle que l'Evangile est venu annoncer la fin du "sacré" ; élection d'un Pape originaire des pays émergents ; plus surprenant encore, élection d'un disciple d'Ignace de Loyola, fondateur  l'ordre subversif des Jésuites qui a toujours voulu réformer l'Eglise de l'intérieur. Indiscutablement une victoire des "réformateurs" contre la "Curie". Il est probable que ce Pape sera atypique, mais il ne faut pas se leurrer, si révolution il y a, elle se fera, ses premiers pas en témoignent, par un retour vers l'Eglise des pauvres et vers l'évangélisation, pas vers une "réconciliation sociétale" avec le monde moderne. Philippe Chenaux, toujours dans le Monde, le constatait en ces termes : "L'Eglise ne pourra jamais se réconcilier complètement avec me monde moderne et être dans le politiquement correct du moment : elle perdrait sa raison d'être en diluant son message. Sur les sujets liés à la famille, au mariage, à la vie, il ne faut pas espérer d'évolution. La position de l'Eglise a sa cohérence; si elle cède sur un point, elle risque de ruiner l'édifice. Mais il y a une marge entre les positions de principes et la tolérance au niveau pastoral, comme sur le sort des divorcés-remariés...ou sur la contraception. On peut aussi imaginer des évolutions sur le mariage des prêtres, moins sur le sacerdoce pour les femmes".

Rien à espérer donc sur ce plan là du pape noir,   son attitude quant à l'approbation du mariage homosexuel en argentine le confirme. Au delà de la tolérance au niveau pastoral, on ne peut cependant exclure que le trait devienne moins "appuyé" et la parole moins récurrente. Il y a quelques semaines, l'historien Claude Langlois, dans un très intéressant article, montrait en retraçant la position de l'Eglise sur l'homosexualité, que c'est justement en faisant du mariage un sacrement au XVIe siècle que cette dernière a été amené à hiérarchiser les "péchés de la chair". Il  a y a ceux qui sont pardonnables, la fornication et le viol, car "réparables", en amenant les coupables à se marier, puis ceux qui constituent un péché "grave" , comme l'adultère qui rompt la filiation, et enfin les péchés "contre nature", homosexualité, zoophilie et même masturbation car ils dissocient sexe et reproduction. L'auteur montre de façon éclairante  comment la question du mariage gay représente une "conflagration" pour l'Eglise : "L'homosexualité dont on ne pouvait pas penser qu'elle soit concernée par le mariage, fait irruption dans l'institution du mariage. Et alors qu'elle condamnait les rapports homosexuels, notamment parce qu'ils étaient inféconds, l'Eglise s'aperçoit aujourd'hui que les homosexuels veulent des enfants!" D'où la nécessité pour elle de recourir à un discours qui ne se réfère pas seulement au dogme en entrant dans le débat sur la théorie du "genre" qui prône un individualisme prométhéen qu'elle combat au nom de l'idée de "nature" et en appelant à l'aide la psychanalyse .

Ce discours n'est plus audible en occident, les évangiles sont allés au terme de leur fonction désacralisante  et les valeurs du christianisme se sont fondues dans la démocratie. Il est destiné aux pays émergents dont les cultures sont encore prêtes à le recevoir. C'est ce que cette élection constate.

A on retour, au moment où la polémique sur l'attitude de Mgr Bergoglio pendant la dictature en Argentine faisait long feu, j'ai vu le passionnant film de Pablo Larrain, "No", qui montre comment, pendant la campagne du référendum qui se terminera par le renvoi de Pinochet, un jeune publicitaire, travaillant jusqu'alors pour le pouvoir en place, a accepté de prendre en charge  la communication de l'opposition en utilisant des méthodes marketing ultralibérales. Un film souvent drôle qui montre les ambigüités de tout combat politique.

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