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24 août 2020 1 24 /08 /août /2020 18:38

La fin du confinement a permis le retour d’une certaine vie culturelle, certes encore bien limitée, avec la réouverture des salles de cinéma, malheureusement peu fréquentées étant donné la psychose virale ambiante entretenue par les médias, et quelques sorties littéraires. Le hasard est sans doute le seul responsable si les oeuvres qui m’ont le plus touchées, tournent autour des années 80, point culminant  de la libération gay, dont la mienne, mais aussi début des années de cendre. Le film d’Ozon, Eté 85, m’a bouleversé, le souvenir de ces années où je vivais pleinement une homosexualité assumée avec frénésie, leur musique toujours aussi présente, mais avant tout parce que cette dramatique histoire d’amour entre deux adolescents ne pouvait manquer d’évoquer la mémoire d’Hervé et la passion dont il avait été l’objet et à laquelle j’ai consacré plusieurs des premiers billets de ce blog. Certes David, le héros du film, diffère en bien des points d’Hervé, dont la fin tragique n’est survenue que des années après notre rupture, si ce n’est cette impossibilité de supporter que l’autre avoue son amour, aveu alors considéré comme un enfermement déclenchant un processus inexorablement destructeur. En dépit du destin funeste de David, l’image que donne le film de l’homosexualité est bien celle de la libération des corps , du jouir sans entrave et dans l’acceptation de soi,  avant que tant des acteurs de ces années libératoires ne tombent comme des mouches.

 

Le « cancer gay », comme on le dénommait au début de la décennie 80, n’avait sans doute pas encore atteint le Treport où se situe l’action du film. Il est au centre du très beau roman de Rebecca Makkai, « Les Optimistes », qui se déroule à Chicago, en cette même année 85, puis 30 ans plus tard à Paris, au sein d’un groupe d’amis, artistes ou journalistes pour la plupart, dont la vie va se trouver fracassée par l’épidémie du sida, dont l’histoire est ainsi retracée, depuis son émergence en 1981, la découverte du virus en 1983, les premiers tests de dépistage en 85, le premier traitement, si peu efficace, l’AZT, en 87 et enfin l’arrivée salvatrice des trithérapies en 96. Comment ne pas me remémorer ces années tragiques, dont je ne sais comment, multipliant pourtant les contacts sexuels, j’ai pu échapper à une contamination, et ces amis disparus, Claude, Cristian, Jacques et tant d’autres sans doute, amants d’une nuit, dont j’ai perdu la trace. Une question, si présente à l’époque, lancinante, émerge à travers le personnage d’Asher, celle de la pertinence de faire le test de dépistage qui venait d’être mis au point : « Ecoute, on est tous condamnés à mort…on ne sait pas quant ce sera. Un jour, cinquante ans? Tu veux réduire la perspective? Tu veux te donner des sueurs froides? ». J’ai fait partie de ceux qui comme Asher, ont refusé de faire le test tant qu’un traitement efficace ne serait pas disponible. Une positivité aurait été  non seulement un possible arrêt de mort, mais aussi, bien souvent, une exclusion de la vie sociale à la fois due au regard des autres et aux conséquences administratives ( perte d’emploi, impossibilité de s ‘assurer, d’obtenir un crédit). Un de mes amants d’alors, qui manifestement repoussait sans cesse tout nouveau rapport sexuel avec moi, finit par me dire, abattu: « Je suis positif. Tu avais raison, Jean-Jacques, je n’aurais pas du faire le test ». Je ne sais quel fût son destin.

 

Ayant également pour cadre, comme dans le film d’Ozon, une plage au bord de l’océan, celle du Vieux Boucau dans les landes, pas très loin de la célèbre plage de drague gay dite « des casernes » où il m’est arrivé de m’envoyer en l’air, il y a bien longtemps, un autre film, un de ceux qui vous hante longtemps après les avoir vus,  a marqué cette rentrée cinématographique, « Madre », de l’espagnol Rodrigo Sorogoyen, histoire d’amour pseudoincestueuse, qui ne franchit cependant jamais les limites, entre un mère qui pleure son fils disparu et un adolescent dans les traits duquel elle le revoit. Comment ne pas être séduit par le personnage pasolinoviscontien interprété par  Jules Poirier, déjà vu dans le rôle de Marvin jeune dans « Marvin ou la belle éducation »  et par le personnage de Maria, la mère, brillamment porté par Marta Nieto?

 

Il serait dommage de ne pas signaler un autre film, « Le colocataire », certes plus mineur, mais qui traite avec intelligence de la difficulté des amours homosexuelles dans la société argentine, qui plus est en milieu ouvrier. L’histoire d’amour impossible entre les 2 héros, dont les corps nus sont très sensuellement filmés par Marco Berger, a le mérite de ne pas sombrer dans les clichés habituels avec le refus du colocataire, Gabriel, de se soumettre aux concessions exigées par son amant qui refuse de vivre leur liaison en pleine lumière.

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4 juin 2020 4 04 /06 /juin /2020 11:12

La veille de l’annonce du confinement je me trouvais à Bordeaux dans ma résidence secondaire, précipitant mon retour vers Paris. J’étais loin de me douter que mon diner, le vendredi précédent, au « Bistrot du sommelier », allait être mon dernier repas au restaurant pour plus de 2 mois. Le rire « philosophique » dont témoignait mon tweet sur les effets collatéraux potentiellement bénéfiques de la pandémie (« frein au réchauffement climatique et délai inattendu pour l’objectif d’atteinte de l’équilibre financier des régimes de retraite…pas idiot de suspendre la réforme »), masquait mal mon désarroi devant les conséquences potentielles du confinement, personnelles certes quant à mes loisirs - pratique du sport, cinémas, butinage sexuel -, mais surtout économiques qui vont être terrifiantes.

 

Sur le plan personnel, étonnamment, si l’impossibilité ou la difficulté des rencontres sexuelles s’est révélé tout à fait supportable - même si j’ai quelque inquiétude quant à la possibilité d’ouverture prochaine des lieux gays - c’est la fermeture des salles de sport qui a mis mon moral en berne, craignant les conséquences sur mon corps vieillissant de l’arrêt de la musculation pendant plus de 3 mois…Il s’en est même fallu de peu qu’on nous interdise de pratiquer le jogging, nécessitant alors d’adjoindre un régime à notre « assignation à résidence » pour éviter une prise de poids inéluctable. J’ai été sidéré de l’hostilité suscitée, avec des appels répétés à son interdiction, y compris de la part de soignants, alors que le risque de sa pratique individuelle était négligeable, bien inférieur à celui de faire ses courses en supermarché. Faudrait il y voir l’expression d’un jalousie de tous ceux qui n’ont jamais trouvé la motivation nécessaire pour faire du sport?

 

Le plus inquiétant dans la période sans précédent que nous venons de vivre fût, face à un politique un temp tétanisé,  la prise du pouvoir de décision par les institutions médicales, incarnées notamment par le Conseil Scientifique. Quel triste spectacle s’est déroulé sous nos yeux sur les chaines d’info où défilaient des soi-disant « experts » dont les affirmations initiales se sont presque toutes révélées fausses qu’il s’agisse de la qualification de « grippette », de l’inutilité du port du masque (ce qui au moins a soulagé l’exécutif puisque nous n’en avions pas), de la certitude d’une 2è vague qu’on attend toujours, des modélisations sur la durée du confinement (jusqu’à la fin de l’été selon certaines) ou du nombre astronomique de morts auquel il fallait s’attendre. Il serait cruel de personnaliser ces informations en citant les noms de ces experts, si ce n’est peut-être en faisant du consultant médical de TF1, le Dr Kierzek, urgentiste (et  syndicaliste…) le symbole de ce naufrage, sans qu’il esquisse jamais une « contrition », contrairement à son collègue de France 2 (le Drmes). Certains cependant, par leur modération, leur expertise réelle des épidémies et leur recul, comme le Pr Bricaire ont un peu sauver l’honneur de la profession.

 

Je n’omets pas la controverse sur l’utilisation de la chloroquine, qui ne pouvait pas me laisser indifférent en tant que médecin de recherche clinique particulièrement impliqué dans la méthodologie des études cliniques. Certes aucune étude n’a démontré son efficacité, mais devant les indices fournies par des essais à la méthodologie déficiente, dont celles du gourou marseillais, il me paraissait plutôt raisonnable, dans l’urgence, d’utiliser sa prescription sous surveillance étroite dans l’attente de résultats plus définitifs. Les rivalités médicales ont tellement pourri la situation, comme en témoigne la publication du Lancet, que nous n’aurons sans doute jamais la réponse puisqu’il n’y a presque plus de malades, du moins en Europe. On peut, à la rigueur, excuser le manque de culture de nombre d’experts et cliniciens français, quant à la méthodologie des études cliniques, mais pas de la part démembres de l’HAS et de l’Agence du Médicament, même si on a déjà pu le constater, malheureusement, en d’autres circonstances. Comment ne pas s’interroger sur leur décision précipitée, il est vrai sur l’injonction d’un ministre stressé, de tout arrêter avec ce médicament, sur les résultats d’une étude notoirement insuffisante, voire douteuse, comme on a fini par s’en apercevoir….

 

L’avenir nous dira peut-être s’il était bien raisonnable, étant donné la courbe épidémique peu différente entre les pays qui ont confiné durement et ceux qui sont restés plus pragmatiques, de mettre à terre l’économie avec des conséquences qui se révèleront dramatiques pour beaucoup, pour épargner la vie de quelques milliers « d’obèses et de  vieux » de plus….

 

Je ne m’étendrai pas sur l’utilisation méprisable de l’épidémie par certains hommes politiques dont Jean-Luc « Hébert » ou terrifiante par des intellectuels ( Emmanuel Todd suggérant presque de rétablir la peine de mort pour nous dirigeants…).

Pour terminer sur une note positive, ce confinement excessif m’aura au moins permis de découvrir des séries de haut niveau, comme Ozark, Bloodline ou l’extraordinaire Breaking Bad sur Netflix, ZéroZéro sur Canal, sans oublier les nouvelles saisons dees incontournables Westworld sur OCS ou Le Bureau des légendes sur Canal.

 

 

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8 février 2020 6 08 /02 /février /2020 14:57

Bien des sujets auraient pu être abordés dans ce blog depuis mon dernier billet. La schizophrénie de la gauche quant aux adolescentes de 16 ans, Mila au bûcher mais Greta béatifiée; le dernier roman d’Echenoz, un exercice stylistique et parodique qui se lit avec ravissement, mais qu’en restera t’il, si ce n’est le souvenir d’un bon moment; le retour de Cruella, alias Ségolène, bonne nouvelle pour les pôles, moins pour la gauche;  les réseaux sociaux, avatar digital de la guillotine; 1917, le dernier film de Sam Mendes et sa vision hallucinante d’une campagne de France d’où Dieu s’est retiré ; Gabriel Matzneff, dont on fait semblant de découvrir les inclinaisons pédophiles (mot qui, faut il le rappeler, désigne l’amour des impubères et non des adolescents), à propos d’une affaire qui n’a rien à voir avec cette pathologie; la chasse à l’homme des militantes féministes qui n’en épargnent que deux catégories, les homosexuels (bénéfice secondaire inattendu) et les islamistes auprès desquels elles défilent…

 

J’aurais également pu consacrer un billet au roman de Kevin Lambert, « Querelle », non seulement parce qu’il montre la sexualité gay dans toute sa crudité et pour reprendre les mots de l’auteur, la puissance des existences minoritaires à questionner le majoritaire, son potentiel de révolte que tend à lui faire perdre la « normalisation » actuelle, mais aussi par la parallèle qu’il fait entre la violence du désir sexuel et celle des luttes sociales, dont il montre en décrivant une révolte ouvrière dans une scierie canadienne, les équivoques, les aspects obscurs et délétères, qui font écho aux violences des mouvements sociaux actuels : « les grands discours de bien commun et de justice sociale, c’est juste des histoires qu’on se raconte pour se convaincre qu’on est des saints de gâcher la vie de gars honnêtes qui travaillent en forêt, de faire perdre la production à toute une usine, de monopoliser l’attention de la région au complet pour nos propres petits interêts médiocres ». Matière à réflexion pour Emmanuel Todd et Michel Onfray que  les gilets jaunes mettent en érection.

 

Pourtant ce qui a semblé ne plus me quitter, ces dernières semaines, a trait à la religion et plus particulièrement à la religion chrétienne. Ce fut d’abord le film bouleversant de Terence Malik, présenté au dernier festival de Cannes, « ma » Palme d’or, chemin de croix jusqu’à la mort d’un jeune paysan autrichien refusant de prêter serment à Hitler au nom de sa foi chrétienne. Mise scène époustouflante, où chaque plan, véritable tableau, est un hymne à la nature.

 

Puis il y eut cet étonnant dialogue, deux visions de l’église, entre le futur Pape François et Benoit XVI, peu avant sa démission, dans le film « Deux Papes » mis en ligne sur la plateforme Netflix, comme prémonitoire de sa prolongation virant à l’affrontement, réel cette fois, à propos de la question du mariage des prêtres.

Etrange coïncidence, c’est encore d’un duel feutré entre deux Papes qui est au centre de la mini-série qui vient de se terminer sur Canal, « the New Pope », mis en scène de façon magistrale par Paolo Sorrentino ( suite de « The Young Pope »), complètement iconoclaste, techno-baroque, mais  bien plus fidèle au christianisme que blasphématoire,  où chaque plan, là encore, est un tableau somptueux avec un  hommage final au Shining de Kubrik. Le doute qui s’installe quant à la possibilité que le « Young Pope » soit une réincarnation du Christ a prolongé l’émotion éprouvée avec une autre série récente, sur Netlix, « Messiah », dont j’ai dévoré les 10 épisodes en moins de 2 jours, thriller spirituel, dont le héros iranien à la beauté fascinante se déclare fis de Dieu, sans se réclamer d’aucune religion mais dont les références chrétiennes sont omniprésentes..

De façon plus anecdotique, je pourrais aussi citer cette émouvante scène de la série « The Crown », entre la princesse Alice, et son fils le Duc d’Edenbourg à pros de la foi, que ce dernier pense avoir perdue lorsqu’elle lui doit sa survie…

 

Point d’orgue de cette séquence « christique », la lecture du dernier livre, posthume, de Michel Serres, « Relire le relié », qui est présenté comme l’oeuvre de toute sa vie. Que Michel Serres fût chrétien, ce ne pouvait être une surprise puisque je le savais fervent admirateur de René Girard.

A partir des deux origines du mot religion, relire et relier, cette relecture des textes sacrés, notamment les Evangiles montre comment la religion, contrairement à l’histoire épisodique, celle des empires, royaumes et systèmes politiques mais à l’instar des mathématiques, de l’argent et de  l’alphabet est un des 4 invariants qui fondent notre culture mais qui à leur axe horizontal qui relie les hommes entre eux, ajoute un axe vertical qui unit le ciel à la terre. Impossible de rendre compte de la richesse de ce livre, je n’en retiendrai ici que ce que l’auteur rappelle à propos de la « sainte Famille », où Jesus n’est pas le fils, où Joseph n’est pas le père, puisque , fils de l‘homme, il est né du Saint Esprit et d’une mère vierge. Il s’agit donc bien d’un enfant sans mère : « l’expression la sainte Famille » signifie donc qu’elle défait les liens charnels, biologiques, sociaux, naturels, ou, comme on a dit structuraux: chacun à sa manière, le père n’est pas le père, ni le fils vraiment le fils, ni la mère absolument la mère; amoindrissement et suppression des liens du sang ». Ce devrait être un sujet de méditation pour la « Manif pour tous »…

 

Je ne sais s’il y a un Dieu, je reste agnostique, mais s’il devait y en avoir un, je préférerais que ce soit celui des chrétiens…

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3 décembre 2019 2 03 /12 /décembre /2019 11:24

Quelques anciens élèves du collège où je fis toutes mes études, Sainte Marie Grand Lebrun à Bordeaux, eurent l’excellente idée d’essayer de réunir la promotion de fin d étude, du moins ceux dont on pouvait retrouver les adresses et qui étaient encore de ce monde…Une énième grève SNCF ayant entrainé l’annulation de mon train, j’ai du, ne pouvant me résoudre à manquer cette réunion, prendre un avion au dernier moment et donc en assumer le surcout. Quelle émotion de revoir, plus de 40 ans après, nombre de ceux qui partageaient les bancs de ma terminale C, et dont un, sans qu’il s’en doute, avait suscité en moi un trouble dont il me faudra encore quelques années pour lui reconnaitre pleinement son origine sexuelle…Dans l’euphorie de la soirée j’en fis l’aveu à ce père de 3 enfants qui ne s’en offusqua pas. Plus tristement j’appris le décès de Michel,  qui, un des étés suivant cette année de terminale, avait furtivement posé la main sur mon sexe à la suite d’une séance de « strip poker », déclenchant une éjaculation immédiate dans un torrent émotionnel. Paralysé par cette première expérience, j’avais refusé les propositions qu’il me fit par la suite, perdant tout contact avec lui et retardant ainsi de plusieurs années mon « coming-out » sexuel…Il est mort seul. Eussè-je été moins inhibé,  Michel aurait pu devenir mon premier amant, avant que je ne les collectionne, un peu comme l’héroïne de « Chambre 212 », le film de Christophe Honoré, à laquelle j’aurais tendance à m’identifier.

 

Le contexte sociétal actuel rend  sans doute plus facile pour un jeune de 18 ans de reconnaitre et d’accepter l’orientation homosexuelle de son désir. Mais pas pour tous. Le dernier film de Xavier Dolan, « Matthias et Maxime » d’un abord un peu difficile du fait du parler populaire en canadien français des personnages, en dépit du sous titrage, montre qu’il peut n’en être rien, même à un âge plus avancé. Beau et puissant film où l’on retrouve les obsessions du réalisateur, notamment son rapport à la mère. Contexte sociétal des pays occidentaux, car en Europe de l’Est, le film bouleversant de Levan Afin, « Et puis nous danserons », nous montre que les amours homosexuels doivent encore se vivre dans la clandestinité et la peur. Non seulement l’orientation homosexuelle n’est pas un choix, contrairement à l’affirmation inepte d’Eric Zemmour, mais des interdits culturels ou sociétaux ne laissent  même pas à certains le « choix » de la vivre.

 

Par un étrange paradoxe, les bénéficiaires des actions de la génération 68, celle pour qui il était « interdit d’interdire» et à laquelle nous devons les acquis quant au droit des femmes et des homosexuels, n’ont de cesse, avec la complicité des réseaux sociaux, de censurer et de s’attaquer à la liberté de penser et de création. Une philosophe reconnue et un ancien président de la république sont empêchés de s’exprimer dans l’enceinte d’une université, Alain Finkielkraut se voit menacer d’interdiction d’antenne sur France Culture et un grand cinéaste de déprogrammation de son film. Les ayatollahs de l’écologie et de la cause animale tentent d’empêcher les agriculteurs de produire et les consommateurs de bénéficier des jours de « promotion », tandis que la gauche radicale pervertit l’antiracisme en manifestant aux côtés d’organisations salafistes. Ces radicalités tentent avec l’aide des réseaux sociaux d’interdire ou de disqualifier toute opinion contraire et s’efforcent de substituer le tribunal médiatique aux institutions judiciaires sapant les bases mêmes de notre démocratie.

 

Notre liberté est à nouveau menacée, il ne nous reste plus qu’à entrer en résistance. Je ne sais si Roman Polanski est coupable de ce dont on l’accuse mais on a le droit de s’interroger quant à une accusation qui survient 40 ans après les faits supposés juste au moment de la sortie de son film, alors qu’ils sont prescrits et qu’il sera impossible pour le réalisateur de se défendre. Je suis donc allé voir son film, excellent, applaudi à la fin de la projection…

 

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30 juillet 2019 2 30 /07 /juillet /2019 16:08

Lorsque j’ai quitté Paris, en milieu de semaine dernière, pour aller passer quelques jours à Bordeaux, les radios d’information continue commençaient à se lasser de l’affaire de Rugy - certes pas le membre le plus sympathique du gouvernement, la façon plus que cavalière dont il a limogé sa directrice de cabinet suffirait à ôter toute envie de le soutenir - dont il apparaissait qu’il avait manifestement été le « bouc émissaire «  de Merdapart qui a tenté de faire oublier que ses enquêtes, dans les affaires Tapie et Libyennes, venaient d’être discréditées. Aurons nous encore longtemps à supporter le rictus tueur que Notre Saint-Just à moustache, justement épinglé en son temps, quand il dirigeait le Monde, par le journaliste Pierre Péan (qui vient de décéder), ne cesse d’arborer?

 

Comme la nature a horreur du vide, la canicule est tombée à pic pour le combler (pendant quelques jours, avant que ces mêmes chaines de radio ne s’emparent sans doute, en boucle, de l’affaire « Steve » dont on vient de retrouver le corps). Il est vrai que la chaleur qui envahissait les rues de Bordeaux en cette fin juillet n’était pas sans rappeler celle de l’année 2003 qui avait quelque peu soulagé les comptes de nos caisses de retraite ( une canicule tous les 16 ans ne suffira cependant pas à régler le problème…).

 

Le temps de poser nos valises à la descente du TGV, et de récupérer une voiture de location en moins de temps qu’il n’en faut pour le dire avec l’application « Virtuo », nous étions en route pour la plage gay du Porge dont j’ai commencé à arpenter les dunes l’été 79 et où j’allais rencontrer Bernard, le garçon qui allait me donner le courage de déserter le domicile familial. Un petit pincement au coeur donc chaque fois que je les traverse pour rejoindre  ou quitter la plage. Mais est ce du au souvenir d’un de mes premiers amours, dont j’ai perdu la trace, ou plutôt à la constatation que ce vaste théâtre d’opération sexuelles n’est plus que l’ombre de ce qu’il fût? En effet si cette destination est toujours prisée des gays bordelais, le week-end , les dites dunes sont en partie désertées , si ce n’est des cacochymes. On pourrait certes incriminer Grindr, ou une lassitude de ma part quant à ce type de drague, rendant mon regard moins objectif, mais les remaniements environnementaux, dus aux tempêtes, feux de forêt et surtout « désherbage » par la municipalité des lieux les plus propices aux ébats sexuels, les rendant difficilement dissimulables,  me semblent en être les raisons principales. La mairie, jamais à court d’idée, vient peut être de porter le coup de grâce. Comme on le sait, les plages gays « naturistes » se méritent, nécessitant le plus souvent plusieurs minutes de marche pour les atteindre. Celle du Porge n’y fait pas exception, puisqu’il fallait compter jusqu’ici environ 15 mn de « randonnée » avant de rejoindre le lieu des érections depuis l‘extrême limite du parking. Il se trouve que depuis le mois de juin, la municipalité (dont le maire serait communiste) a décidé d’interdire l’accès au parking terminal (suppression de plusieurs centaines de places) rallongeant ainsi le parcours pédestre d’au moins 10 minutes et cela à condition de trouver une place proche de la zone interdite ce qui deviendra problématique les jours d’affluence…Homophobie du maire? Même pas sûr puisqu’il avait pris une décision similaire l’année précédente pour l’extrémité du parking situé dans la direction opposée, interdisant ainsi l’accès facile à la plage « échangiste ». Tout ceci soi disant pour « protéger la nature »….Il existe certes d’autres plages gay dans les environs, mais d’après ce que j’ai entendu dire (je n’y suis plus allé depuis des années) celle de la Lagune du côté de la dune du Pilat n’est plus fréquentée et celle des « casernes » dans les landes est beaucoup trop loin de Bordeaux.

 

Ceci ne nous a pas empêché de bronzer nu tranquillement sur la plage, par une température bien plus supportable qu’à Bordeaux, 7 à 8 degrés de moins…

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20 juin 2019 4 20 /06 /juin /2019 14:02

A la lumière de l’évolution récente de la situation politique, il serait cruel de renvoyer les éditorialistes les plus médiatisés à leurs commentaires de la fin de l’année dernière , en pleine crise des gilets jaunes, quand ils clamaient haut et fort qu’Edouard Philippe était condamné et que sa démission surviendrait au plus tard après les européennes...Il était certes difficile d’imaginer que notre président allait rééditer l’exploit, partagé uniquement par Sarkozy mais dans des circonstances bien plus favorables, de résister plus qu’honorablement dans des élections intermédiaires, qui plus est après la curée dont il fut l’objet dans le cadre de l’affaire Benalla et surtout la jacquerie des « gilets jaunes ». Les lecteurs de ce blog ne seront pas surpris d’apprendre la douce euphorie qui m’a envahi à l’annonce des résultats des partis de Vauquiez et Mélenchon....

 

Durant cette période électorale, les sorties cinématographiques se référant de près ou de loin à la question gay ont été nombreuses. La bande annonce des « Crevettes pailletées » m’aurait plutôt détourné de ce film, tant la caricature semblait grossière, si je n’avais révisé ma position à la lecture de certains critiques. Certes la caricature de certaines typologies homosexuelles est parfois un peu lourde, mais le film est presque constamment touchant dans son approche des homosexualités, atteignant son objectif de plaidoyer contre l’homophobie avec un final mémorable... Applaudissements  nourris à la fin de la projection, pas uniquement de la part de fraction gay de l’auditoire...

Par un contraste saisissant, j’avais  vu quelques jours avant « tremblements », film d’une noirceur rare qui narre la descente aux enfers d’un quadra, membre d’une  famille de la haute bourgeoisie guatemaltaise du fait de son mariage à sa riche héritière. La révélation accidentelle de son homosexualité va l’entrainer à subir une thérapie de conversion sous la pression incessante de sa famille, embrigadée dans une secte protestante intégriste, jusqu’à lui faire intérioriser un sentiment de honte, la haine de soi. On pourrait reprocher à ce film, dont il faut cependant souligner la  beauté de la mise en scène, de témoigner d’un pessimisme quelque peu daté, contrairement à « Boy erased », sorti quelques semaines avant, au thème plutôt  similaire mais dont le héros va suivre une trajectoire libératrice.

L’islam radical comme thérapie de conversion, c’est la question qu’on pourrait se poser à propos du dernier film de Téchiné , « L’adieu à la nuit », dont certains ont affirmé à tort que l’homosexualité était pour une fois absente puisque celle, refoulée, du héros est suggérée à deux reprises....

 

Le dernier Almodovar, un de ses plus beaux films, « Douleur et gloire », vient couronner cette séquence, sans qu’il soit nécessaire ici d’ajouter au concert de louanges qui a accompagné sa projection à Cannes, si ce n’est en témoignant de l’intense émotion suscitée par cette scène qui pourrait devenir culte, où le réalisateur enfant s’évanouit à la vue de la beauté d’un jeune corps masculin nu...

 

En attendant la sortie du dernier Xavier Dolan, on peut patienter en visionnant la série consacrée aux chroniques de San Francisco sur Netflix avec une distribution de premier choix et un premier épisode plus que prometteur,  ou en dégustant le dernier thriller mémoriel de Victor Del Arbol, « Par delà la pluie », toujours aussi noir, entremêlant des destinées où l’homosexualité est souvent présente.

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19 septembre 2018 3 19 /09 /septembre /2018 15:42

C’est en plein délire médiatique sur l’affaire Benalla que j’ai quitté Paris, fin juillet, pour trois semaines de vacances qui allaient, comme chaque année, me mener à traverser la France pour rejoindre Sitges. Long périple en voiture seul au volant, que je peux espérer être le dernier, Bertrand venant de passer avec succès l’épreuve du code…

Première étape dans le petit village d’ Angles sur L’Anglin, repéré lors d’une émission consacrée aux plus beaux villages de France, l’occasion de dormir dans un petit hôtel de charme et de prendre quelques heures de sommeil d’avance, Grindr ne révélant aucune âme gay dans un périmètre raisonnable. Bordeaux n’était plus qu’à trois heures de route, le temps de déposer nos bagages dans notre pied à terre et de partir aussitôt vers le Porge océan, sa belle plage, son endroit gay et ses dunes accueillantes quoique bien moins fréquentées que dans ma folle jeunesse. Ces quelques jours dans ma ville natale furent aussi l’occasion de découvrir le magnifique village de l’Herbe, sur le bassin, à deux pas du Cap-Ferret. Ou plutôt redécouvrir car j’eus aussitôt une impression de déjà vu, j’étais déjà venu là, pas seul, mais impossible de me rappeler le garçon qui m’y avait amené lorsque j’habitais Bordeaux…La nuit gay bordelaise n’est plus très animée et aussi diversifiée depuis que le BHV, le TH et le Yelow Moon ont disparu. Certes le Trou’duc ou le Coco-Loco sont des bars sympathiques mais plutôt gay friendly avec une forte présence féminine et seul le Buster garde une ambiance sexe. Je suis toujours surpris de ne plus apercevoir dans les bars gays bordelais (si ce n’est parfois au Porge) ceux de ma génération, croisés ou rencontrés dans les années 80/90. Ils ne peuvent avoir tous quitté la ville ou renoncé au marché du sexe, ou changé à un tel point que je ne les reconnaisse plus…A moins qu’ils ne continuent à draguer à l’ancienne, hantant de nuit les espaces publics, comme la dalle de Mériadec, où je fis tant de rencontres lorsque j’habitais, de 1981 à 1988, un des immeubles qui la surplombe et apparemment toujours le siège de ratonnades anti-homos, si l’on en croit un  thriller récemment paru, « Parfois c’est le diable qui vous sauve de l’enfer », de l’écrivain bordelais Jean-Paul Chaumeil.

Rejoindre Sitges en traversant les Hautes Pyrénées permettait d’éviter le Perthus, ses bouchons et de marquer une étape à Argelès-Gazost, village où se sont rencontrés mes parents – j’y fus peut-être conçu- et qui fut le point départ de multiples randonnées vers les « 3000 » de la région avec mon précédent ami. Au retour d’une éprouvante balade sous un soleil de plomb jusqu’au pied de la grande cascade du cirque de Gavarnie, nous pûmes constater que le « Grand remplacement », l’obsession de Renaud Camus, n’était pas près d’advenir dans ce village très gaulois : des restaurants proposaient des repas « autour du cochon » et la station-service où je me suis arrêté affichait « ici nous sommes en république, on n’entre pas voilé » ... Nuit calme, aussi peu de gays que de « remplaçants » …

La scène gay de Sitges ne présentant pas cette année de changements notables par rapport au billet que je lui avais consacré ces deux dernières années, je ne m’étendrais pas sur les 10 jours toujours intenses que nous y avons passés, sous une chaleur parfois éprouvante.

Le temps s’avérant désespérément beau cette année, nous pouvions tenter, sur le retour, après une nouvelle halte à Bordeaux, de nous aventurer, non en Bretagne (le risque climatique étant trop grand…) mais en Vendée, région qui m’était totalement inconnue. Notre choix s’est porté sur Noirmoutier dont le caractère sauvage, de la nature environnante certes, mais aussi de la population nous a quelque peu surpris, de l’hôtelière qui nous a refusé d’aller aux toilettes tant que les chambres n’étaient pas prêtes, aux restaurateurs qui vous annoncent, lors d’une tentative de réservation, que tout est complet alors que vous trouvez des tables en vous pointant au dernier moment, sans parler des clients qui désertent la piscine de l’hôtel en fin d’après-midi en clamant qu’ils vont à la messe…La Vendée serait-elle un bastion de la Manif pour tous ? Nous trouvâmes cependant une plage semi-naturiste fort agréable.

De retour à Paris je me suis précipité pour voir le film de Camille Vidal-Naquet, « Sauvage », histoire dramatique d’un SDF, prostitué homosexuel et drogué, souvent touchant, parfois bouleversant mais le sordide d’une scène d’une sexualité « extrême », inutile, ou le portrait à la limite de la caricature de certains des « clients » du héros suscitent une certaine réticence. L’interprétation de Félix Maritaud est époustouflante.

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17 juillet 2018 2 17 /07 /juillet /2018 15:17

Il y a 20 ans, en plein milieu d’une interminable et douloureuse séparation d’avec celui qui venait de partager 15 ans de ma vie, la victoire de la France en coupe du monde de foot avait, pour une soirée, dissipait les nuages qui embuaient mon esprit, non que je fusse un passionné de ce sport, mais la joie qui déferlait dans les rues était communicative. Je m’étais même rendu, fort tardivement, après un long détour aux soirées « dominicales » très « hot » d’une boite annexe du Scorpion, sur les champs Élysées à un moment où la fête était finie, un accident provoqué par une voiture folle venant de disperser la foule.

En 2010, le mirage de la société multiculturelle que la presse avait célébrée à l’occasion de cette victoire, s’évanouissait dans l’épopée lamentable en Afrique du Sud. Je m’étais vu alors censurer un billet de ce blog, intitulé je crois « Black, blanc beur », sous prétexte qu’il aurait pu déplaire aux « annonceurs ». J’avais donc hébergé ce billet sur « Gayattitude », mais ce site ayant disparu, je n’ai pu en retrouver la teneur. Sans doute devais je émettre quelques réserves sur l’angélisme des médias quant à l’immigration, me faisant l’écho de certains écrits de Renaud Camus, tout en commençant à m’effrayer de ses positions politiques ( http://limbo.over-blog.org/tag/politique/3).

Cette année, toujours aussi peu passionné par ce sport, j’ai assisté à la victoire de notre équipe dans un bar du marais, où, sans doute pour la première fois en un tel lieu, la foule a entamé la marseillaise, non sans penser, avec tristesse, aux tweets ravageurs que devait être en train d’écrire un de nos grands écrivains.

En 1998, j’étais un fidèle et assidu lecteur du journal Renaud Camus, auteur découvert avec « Tricks » mais surtout enthousiasmé par « Buena Vista Park » et ses « Chroniques Achriennes ». Nous étions deux ans avant la triste et célèbre « affaire Camus », monumentale et injuste cabale déclenchée par quelques phases extraites de son journal de l’année 1994 (« La campagne de France »). Est-ce de ce moment qu’il faut dater la dérive intellectuelle qui allait l’amener jusqu’aux tweets les plus extrêmes qu’il a pu émettre au cours de cette coupe du monde,  où il a souhaité la "victoire de l’équipe européenne contre l’équipe africaine" ? Certes l’acharnement médiatique dont il fût victime dans les années 2000 a pu contribuer à exacerber les traits de type paranoïaques qu’on pourrait déceler dans ses premiers écrits (la relecture récente de Buena Vista Park m’a fait retrouver en filigrane certaines de ses idées actuelles), mais un autre évènement, survenu à la même époque, m’apparait bien plus fondateur de ce changement « d’épistémé » que l’on trouve dans son journal à la charnière des deux siècles : la rencontre avec Pierre, survenue un an avant « l’affaire ». Non par une influence directe, je suis loin d’être persuadé que l’ami qui partage sa vie depuis près de 20 ans, et avec qui j’ai eu l’occasion de diner il y a plusieurs années car il était un des collègues de lycée de mon ex-ami, partage pleinement ses positions, mais parce qu’elle a mis fin à son vagabondage sexuel (ce terme n’a aucune connotation péjorative chez moi…) qui constituait la trame omniprésente de son journal. Nous assisterions en fait au « remplacement » d’une obsession, le sexe, par la transformation progressive d’un malaise devant le comportement culturel africain et arabo-musulman, perceptible dès ses premiers écrits, en une obsession d’une invasion par les peuples qui portent cette culture, obsession qui confine parfois au délire paranoïaque (il suffit d’aller jeter un coup d’œil sur son compte tweeter...).

J'ai arreté de lire Renaud Camus quand son journal a cessé d'être publié en librairie (il est maintenant en ligne sur le site de l'auteur). Il me manque pourtant, mais je préfère rester à l'écart de sa part "maudite".

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6 juin 2018 3 06 /06 /juin /2018 15:25

 

Mon séjour à Bordeaux, le week-end dernier, a coïncidé avec la date de la Gay Pride bordelaise, 20 ans après celle à laquelle j’avais participé avec un ami parisien, le temps d’une très éphémère romance. Nettement plus de monde cette fois-ci, même si on restait loin des foules parisiennes, avec une bouffée d’air rétro d’avant la « normalisation » gay, avec son ambiance festive et colorée, comme souvent en province, vitrine de nos différences. Une bouffée seulement, car les discours et les slogans de la tête de la manifestation montrait le triste noyautage gauchiste de la LGBT locale mettant plus l’accent sur la haine du capitalisme et de Macron que sur nos préoccupations.

 

La « normalisation » gay, il en a maintes fois était question dans ce blog, non pour la regretter, mais pour en souligner les effets pervers collatéraux qui tendent vers notre « déculturation » et la perte de notre identité, ou plutôt de « nos » identités ( http://limbo.over-blog.org/article-l-homosexualite-est-elle-soluble-dans-le-conformisme-53487533.html ) dans la substitution du droit à « l’indifférence » au droit à la « différence ». C’est donc avec intérêt que j’ai entrepris la lecture du petit opuscule d’Alain Naze, « Manifeste contre la normalisation gay », que je pensais être dans la lignée de l’ouvrage sus cité. Loin de là…Certes l’auteur cite marginalement les conséquences négatives de la « normalisation gay », avec la disparition progressive des lieux de drague que favorisait la clandestinité et des quartiers gays et l’exclusion de ceux qui donnent une « mauvaise image » de nous (les folles), en d’autres termes la marche vers notre « invisibilité », mais ce n’est pas là le cœur de son propos.

Notre auteur se présente en fait comme un militant nostalgique du FHAR des années 70 (voir billet précédent), quand ce mouvement voyait l’homosexualité comme fer de lance de la révolution, mais contaminé de surcroit par l’islamo gauchisme… Les organisations LGBT, peu suspectes pourtant de dérive droitière, sont ainsi accusées de favoriser l’homophobie en exportant la notion d’identité homosexuelle dans des régions où elle n’existe pas, en un mot de colonialisme! Rejetant « l’essentialisme », dans la lignée de ceux qui considèrent que l’homosexualité n’existait pas en Grèce, il suppose que celle des pays émergents serait « d’une autre forme » que celle du modèle occidental.  Dans le même esprit il s’insurge contre la pression de l’homosexualité blanche (pas si loin en fait du « male blanc » de Macron !) en faveur du « outing », combat qui ne recoupe pas celui de la plèbe, qui aurait peu de raison de se reconnaitre dans les manifestations favorables au mariage pour tous. La référence à Guy Hocquenghem (dont Edouard Louis serait l’héritier spirituel ?) est omniprésente. Alain Naze n’est pas isolé : un récent colloque à l’université de Nanterre, en plein blocage, avait pour contenu "l'homoracialisme", "l'impérialisme gay" ou encore "l'extrême gauche blanche"...

 

Ce pamphlet sectaire n’interroge jamais la notion même de normalisation, qui n’était pour les auteurs d’ « Homographies » (l’absence de la référence à cet ouvrage est stupéfiante : http://limbo.over-blog.org/article-adapte-toi-a-notre-homophobie-ou-de-l-heterosexualisation-de-l-homosexualite-109687347.html) qu’un leurre, un épisode peut être éphémère de notre histoire, réversible, tant l’homophobie est profondément enracinée chez l’hétérosexuel, masquée par un comportement compassionnel un peu similaire à celui plus récemment développé pour l’espèce animale…Dans une optique inverse, celle de William Marx dans son « Savoir Gai » dont j’ai rendu compte dans un billet récent, beaucoup plus optimiste, notre normalisation est impossible tant le « regard gay » diffère de celui de l’hétérosexuel et loin de nous faire rentrer dans le rang « hétérosexuel » quant à nos pratiques sexuelles (que le très beau film de Christophe Honoré, « Plaire, aimer et courir vite » illustre à merveille) la loi sur le mariage homosexuel pourrait au contraire influencer celle des hétérosexuels….

 

Lundi dernier, assistant au repas de la section parisienne de l’amicale des anciens élèves de Sainte Marie Grand Lebrun, où je fis toutes mes études, en présence d’un prêtre, le provincial de l’ordre des Marianistes, au moment des présentations, où pour la première fois (la dernière réunion remontant à 5 ans), je déclinais un « marié sans enfants », dont mon alliance témoignait,  à la place de mon habituel « célibataire », je me demandais ce que je répondrais si on me posait une question « indiscrète » sur ce mariage récent….Normalisation, tu n’es pas au bout du chemin…..

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23 avril 2018 1 23 /04 /avril /2018 15:13

Avril 1978, ma deuxième naissance ce jour où j’allais rencontrer Philippe, dans un cinéma « porno » de la rue Vivienne à Paris, dont je venais d’apprendre l’existence dans un article du journal « le Point ». Lorsque je retournais dans ma province bordelaise, quelques jours plus tard, transfiguré par cette première expérience sexuelle (http://limbo.over-blog.org/article-ma-premiere-fois-pour-son-malheur-44231829.html), je n’aurais pas imaginé que rencontrer des garçons aller maintenant rythmer ma vie de façon quasi ininterrompue, parfois frénétiquement comme s’il était possible de rattraper le temps perdu, et encore moins que 40 ans plus tard de telles rencontres soient encore si fréquentes sans que  j’ai jamais eu besoin de recourir au sexe tarifé…Le jeune homosexuel que j’étais jetait en effet un regard presque réprobateur, toutefois sans agressivité comme on peut le constater sur le net aujourd’hui,  sur ces plus de « 50 ans » qui osaient encore fréquenter les lieux de drague…Quant à l’idée même d’un mariage « gay », elle aurait déclencher chez moi un immense éclat de rire.

En effet, en ces temps-là, à la fin des années 70, le militant gay était plutôt « révolutionnaire », moins sur le plan « politique » comme le FHAR (front d’action révolutionnaire) dans les années post 68, que sur le plan sociétal contre l’oppression hétérosexuelle et ses normes « familiales » qu’on voulait exploser, avec la création du GLH (Groupe de libération homosexuelle), puis du CUARH (Comité d’urgence anti répression homosexuelle). Je m’insérais, sur un mode moins politique, dans ce mouvement en participant activement, à la création sur Bordeaux d’une association homosexuelle, « Les Nouveaux Achriens » (terme proposé par Renaud Camus, auteur pas encore maudit et surtout connu pour la publication de « Tricks », journal de ses rencontres sexuelles, qui le préférait à celui de « gay » qui commençait à s’imposer).

Mon coming-out « sexuel » survenait au meilleur moment, celui où on allait basculer de la période « pré-gay », à celle de la « libération des corps » au rythme de la musique Disco. Quelques mois plus tard paraissait le premier numéro du journal Gai Pied suivi de peu par la publication d’une revue trimestrielle, à ambition culturelle, « Masques, revue des homosexualités », dont la sortie donna lieu à une grande fête au Bataclan.

J’aurais presque oublié cette revue, dont la lecture m’a pourtant accompagnée les quelques années de sa parution, si je ne venais de lire, avec intérêt, la biographie de Jacques d’Adelsward-Fersen par Viveka Adelsward et Jacques Perrot, livre qui m’a été envoyée gracieusement par son éditeur, espérant que je puisse en faire état dans ce blog. J’avoue, bien que Roger Peyrefitte lui ait consacré un roman, « L’exilé de Capri », que je n’avais jamais entendu parlé de ce poète et romancier français, de lointaine ascendance suédoise, dandy aristocrate qui fréquentait les cercles proustiens, et dont l’homosexualité fût révélée au grand jour au début du siècle dernier, il avait 23 ans, à l’occasion d’un scandale de mœurs impliquant des mineurs qui étaient amenés à participer plus ou moins dénudés à des « tableaux vivants ». Condamné pour « excitation de mineurs à la débauche », après plusieurs mois de prison, il choisit de s’exiler à Capri avec Nino, qui va partager sa vie, jusqu’à son suicide à l’âge de 42 ans. Durant cet exil, outre la poursuite de son œuvre littéraire, il va lancer en 1909 une revue mensuelle, Akademos, traitant de l’homosexualité sous l’angle artistique et littéraire, mais aussi progressivement sous celui du militantisme. Sa parution fut éphémère, à peine un an, en partie pour des raisons financières mais aussi en vue d’un projet plus ambitieux et plus ouvertement militant. Akademos, première revue homosexuelle, me semble préfigurer, 70 ans avant, ce que sera Masques. Un pionnier de la libération gay qui mérite de sortir de l’oubli.  

L’actualité cinématographique nous rappelle combien ce parcours vers notre « visibilité » fut long et douloureux. La remarquable saison 2 de la série American crime, "The assassination of Gianni Versace", centrée autour du parcours 4 fois meurtrier de son assassin, nous montre que Versace, dont la sœur lui lance quand il décide de faire son coming-out, « "Tu as oublié que le monde est horrible" », a été aussi la victime de l’apathie homophobe de la police. Le très émouvant film de Luca Guadagnino, « Call me by your name », avec un époustouflant Timothée Chalamet, nous livre un dialogue d’anthologie entre un père et son fils sur le caractère unique, irremplaçable, fondateur du sentiment amoureux, aussi douloureux soit-il.

Un coup de cœur pour clore ce billet : les deux premiers opus du « quatuor bordelais » de l’auteur anglais Allan Massie, « Printemps noir », puis « Sombre été à Bordeaux », enquêtes policières durant l’occupation, où l’intrigue s’efface devant l’étude des caractères en ces temps troublés, atmosphère assez semblable à celle de la série « Un village français », une sorte d’alchimie entre Simenon et Philippe Kerr, avec notamment des personnages homosexuels attachants (le plaisir de lecture de ces deux romans rendent très indulgents vis-à-vis de petites imperfections quant à la connaissance de Bordeaux ( Le café des arts n’est pas cours de la Marne mais cours Victor Hugo…)).
 

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