Je n’ai pu voir ce premier débat des primaires, mes obligations professionnelles m’en ont empêché, mais je doute qu’il ait pu modifier mon inclinaison, qui ne date pas d’aujourd’hui, pour François Hollande. Je ne sais encore si je participerai au vote, puis je vraiment signer un document où j’affirmerais mon adhésion aux valeurs de ce parti ? On a d’ailleurs du mal à croire qu’elles soient exactement les mêmes pour les six candidats, mais après tout comme l’élu, quel qui soit, s’il remporte la présidentielle se verra forcé (par la «realpolitik») de les trahir, plus ou moins vite, on ne prend pas grand risque à le signer en fermant les yeux?
Je n’ai pas non plus beaucoup vu Budapest, tout juste le temps d’apercevoir, des fenêtres du taxi qui m’amenait de l’aéroport à mon Hôtel, quelques vestiges de l’empire Austro-hongrois sur les façades d’immeubles bordant les rues de Pest, et au loin sur les bords d’un danube qui n’avait rien de bleu le château et les monuments de Buda que j’avais eu l’occasion de découvrir, trente ans plus tôt, avant la chute du mur. La vie nocturne de Budapest est sans doute aujourd’hui beaucoup plus animée que du temps où Brejnev régnait sur Moscou, je n’ai pas eu le temps d’aller l’explorer, mais si on en juge par la fréquentation par la jeunesse locale des sites internet, gayromeo semble très populaire ici aussi, les rencontres doivent pouvoir s’enchainer...Ce n’était point le cas à St Laurent de Cabrerisse, petit village des corbières perdu entre Carcassonne et Perpigan, où je participais dès mon retour à un séminaire de travail, le GPS du logiciel de rencontre « GRINDR » de mon ipad ne localisant pas âme qui drague à moins de 20 kms....
Du temps donc pour me lancer dans la lecture d’un roman improbable, celui d’un petit génie de 19 ans, Marien Defalvard. « Du temps qu’on existait » nous conte la dérive mélancolique et la détestation de son temps d’un homme qui se penche sur son passé, mélancolie que rien, depuis le paradis perdu de son enfance familiale, ne vient adoucir, y compris ses éphémères rencontres masculines. On ne peut pas ne pas évoquer Proust. Le style, une fois qu’on s’est laissé emporter par lui, la lecture n’en est pas limpide, est étincelant, envoutant. Seule réserve, derrière le sentiment d’assister à l’avènement d’un grand écrivain, celle justement de s’être laissé envouté, de s’être « fait avoir », et que l’auteur ne se révèle un jour être à la littérature ce que BHL est à la philosophie.
Pas d’envoutement, plutôt une certaine perplexité, après avoir vu le film de Nanni Moretti, « Habemus Papam ». Certes on passe un assez bon moment, c’est parfois drôle, et Piccoli égal à lui même, mais on voit mal quel est le propos de l’auteur qui balance entre la caricature du collège des cardinaux, de la psychanalyse, voire du sport d’équipes. Si c’est l’Eglise qui est visée, la satire est plutôt douce, elle aurait facilement pu être plus cruelle. Etrange cette absence presque totale du film de la « religion», comme si aucun des cardinaux n’avait été touché par la « grâce », comme si aucun n’était habité par la « foi ». Etrange aussi cette affirmation d’une réticence de l’Eglise aux théories freudiennes, le cinéaste ne sait il pas qu’elles influencent au contraire fortement ses positions , notamment sur l’homosexualité ou sur la « théorie du genre » !
« Ceux que j’aimais de façon immanquable, suivaient tous le même rituel à travers mes perplexités intérieures, mais il fallait, pour qu’à chaque fois le processus
puisse se renouveler sans que je l’anticipe, que la personne sur laquelle j’avais fixé mon sentiment, me paraisse toujours nouvelle, qu’elle semble écraser de son simple nom couché une pléiade
d’antécédents bavards et divers, qu’elle les enterre, tous »
(Marien Defalvard, Grasset, 2011.