En parcourant un blog sur un site gay je suis tombé sur les propos suivants : « Les actifs/passifs affichés sont en majorité passifs, on le sait tous et on sait très bien
pourquoi: il est très difficile de s'assumer uniquement passif. C'est un peu compréhensible, le passif est souvent considéré comme efféminé, c'est celui qu'on traite de pédé en priorité, c'est
bien sûr celui qu'on traite de salope ou de sac à foutre... C'est donc surtout un problème d'image: on met tout de suite dans la catégorie passif un mec efféminé alors que ce n'est pas forcément
le cas. Je veux surtout donner un conseil aux jeunes qui débutent lol : choisis plutôt d'être actif, entraîne-toi tout de suite. Les avantages sont nombreux. En tant qu'actif, on se sent moins
homo et on l'est moins aux yeux des hétéros. Celui qui fait l'homme est moins homo que celui qui fait la femme. C'est quand même plus viril…»
Une lecture trop rapide du dit billet, isolant ces quelques phrases de l’ensemble , aurait pu faire craindre une certaine homophobie, à tort, l’auteur affirmant haut et fort sa passivité en fin
de billet. Si ce texte m’a frappé c’est d’abord parce qu’il m’est arrivé, au moment de mon « coming out » et de ma période « militante » de détourner les concepts freudiens en définissant les «
actifs exclusifs » comme des hétéros latents, et surtout parce qu’il m’a rappelé ce que j’ai pu lire, il y a longtemps, à propos de Sartre qui aurait écrit (dans son livre sur Genet ?) que la
seule vrai homosexualité était l’homosexualité passive. En fait, en dépit d’un recherche « google » intensive, je n’ai pu retrouvé ses propos de Sartre et Didier Eribon n’y fait aucunement
allusion dans l’article ci-dessous
http://didiereribon.blogspot.com/2007/07
Pourtant cela ne semble pas si étonnant que cela si l’on se réfère à d’autres écrits de Sartre, antérieurs à son livre sur Genet : « l’orientation psychopathologique des homosexuels assumés ou
refoulés vers la collaboration, […] (est) essentiellement marquée par des attitudes féminines de soumission, de ruse et de séduction à l’égard des Allemands.
(http://culture-et-debats.over-blog.com/article-11988561.html).
Ces propos de Sartre vont tout à fait dans le sens du dernier livre de Patrick Buisson sur la sexualité à Vichy et de son hypothèse originale quant à la genèse de l’homophobie (Patrick Buisson,
pour ceux qui ne le connaitraient pas, est un journaliste politique, polémiste redoutable, longtemps sur LCI, qui a collaboré à Minute et au Crapouillot, très à droite donc, et aujourd’hui
conseiller politique de Nicolaparte). Ce livre cherche (entre autres) à expliquer pourquoi « l’homosexualité, largement acceptée en France jusqu’à la guerre, avait subi, de 1945 à 1968, une telle
répression ». Cette thèse appuyée sur de nombreux exemples : « Brasillach, Genet, Fraigneau, Jouhandeau, Benoît-Méchin, Abel Bonnard (excellent portrait de Gestapette), Montherlant, on n’en
finirait pas de citer tous ceux que l’enthousiasme esthétique pour les Appolon germains et les Siegfried casqués a poussé vers de fâcheuses dérives ». On oublie souvent que Genet a écrit avec «
Pompes funèbres » une déclaration d’amour au nazisme et que « Aspect comique de l’affaire : la déification de Jean Marais sous l’occupation. Loin d’être un avorton l’acteur emprunte aux guerriers
vainqueurs la splendeur de leur anatomie, tout en devant une icône du désordre moral ». De ce croisement entre imagerie nazie et fantasmes homosexuels « est née après guerre, je pense,
l’homophobie, terme qui n’existait même pas avant guerre ». On aurait ainsi assimilé amitiés particulières et penchants à la trahison. Selon Patrick Buisson est ainsi né le préjugé selon lequel «
la sexualité des individus les prédestine en politique à un type de comportement particulier, singulièrement l’homosexualité….identifiée à des valeurs féminines, prédétermine une attitude de
soumission, étrangère à la virilité….L’inverti est cet être qui non seulement est toujours subjugué par la force, mais en tire un plaisir inavouable, ignominieux ». « Dans cette idée, stupide si
on la généralise, niche les racines de l’homophobie ».