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22 septembre 2015 2 22 /09 /septembre /2015 15:38
De la French Theory à l'univers orwellien

Michel Houellebecq était l’invité de rentrée de l’émission de Laurent Ruquier « On n’est pas couché ». A ses interlocuteurs se référant aux succès des livres de Zemmour, Finkielkraut, Onfray et à la montée du FN, dont il contestait les affirmations selon lesquelles son point de vue sur l’islam se situerait «dans l’air du temps», il lui fallut préciser, ce qui semblait pourtant évident, qu’il ne parlait pas du « peuple», mais de la doxa médiatique totalement colonisée par la gauche «bien-pensante». La sortie sur les écrans de la palme d’or à Cannes, «Deephan», le dernier film de Jacques Audiard, est venue à point nommé pour en donner une preuve éclatante tant il s’est fait «éreinté» dans la presse de gauche, l’exemple le plus pathétique ayant été donné par un chroniqueur de l’Observateur, un certain Vincent Malausa : « arrogant et stupide. Un film politiquement infect…. agonisant dans sa bêtise et comme étourdi de sa petite puissance de roitelet d'un hypothétique néo-cinéma de genre français… ». Ici chapelet d’injures d’une chronique abjecte, là incroyable mauvaise foi d’un article des Inrocks qui s’indigne de découvrir que la banlieue où a été tourné le film est en fait sans histoire, comme s’il s’était agi d’un documentaire et non d’une œuvre de fiction : l’histoire d’un exilé sri-lankais qui, fuyant la guerre civile de son pays, réussissant à immigrer en France grâce à de faux papiers et la constitution d’une famille fictive et s’intégrant, plutôt avec succès, va retrouver, confronté à la violence des bandes organisées de sa banlieue d’accueil, ses instincts de guerrier tamoul pour protéger cette femme qui n’est pas la sienne et dont il va finir par tomber amoureux. Cette peinture d’une certaine banlieue française comme zone de non droit, jointe à un exil final dans une Angleterre idyllique (sur ce dernier point les intentions du réalisateur restent certes obscures) ne pouvait que s’attirer les foudres de la «censure de la bien-pensance».

L’instrumentalisation de la photo d’un enfant mort sur une plage, témoin de l’exode d’une population fuyant désespérément une autre guerre civile, qui s’éternise en partie du fait de l’inertie de l’Europe, comme l’a illustré la caricature de Charli Hebdo, a permis de rendre inaudible tout autre discours que celui humanitariste de la doxa médiatique, mais avec d’inattendus et savoureux effets collatéraux. En effet, il y a peu encore, durant la crise grecque, Angela était adulée par la droite «républicaine» et vouée aux gémonies par la gauche paranoïaque et son allié virtuel le front national. Quelques mois plus tard, la posture de la chancelière comme guide moral de l’Europe a rendu la droite schizophrène et sidéré l’extrême gauche qui n’avait pas besoin de ça après la «trahison» de Tsipras, qui tel la chèvre de monsieur Seguin avait cédé au petit matin. Mais notre nouvel Hébert, Jean-Luc Mélenchon, n’allait pas se laisser troubler bien longtemps avant d’ajouter un chapitre à son «hareng de Bismark» en accusant une nouvelle fois Angela, qui n’est certes peut-être pas totalement angélique dans cette affaire, de tuer l’Europe : "Ce que fait Mme Merkel, c'est un leurre. Et nous le paierons cher". Le seul point qui le séparait encore de « la fille du père» étant l’attitude vis-à-vis de l’islam, on pourrait se demander si cette dernière diatribe n’est pas le début d’une ultime convergence : aurait-il peur d’une porte ouverte à l’islamisation accélérée de l’Europe, prélude à l’autoréalisation du roman «prophétique» de l'écrivain algérien Boualem Sansal, 2084, présélectionné pour le Goncourt, décrivant une Europe sous l’emprise du totalitarisme islamique et dont Houellebecq en avait fait l’éloge dans l’émission de Ruquier ?

Ce roman fait bien sûr écho à 1984, à un moment où Orwell tend à devenir la référence de ces intellectuels français, dont les plus représentatifs ont été cités en début de billet, qui dénoncent la fracture sans cesse élargie par la censure de la bien-pensance, entre l’idéologie dominante et la culture populaire. Comment ne pas rapprocher ces quelques lignes d’Orwell ( http://www.slate.fr/story/103135/printemps-orwellien-intellectuels-francais ) «Profondément enracinées dans l'économie planétaire et ses technologies sophistiquées, culturellement libérales, c'est-à-dire “modernes”, “ouvertes”, voire “de gauche”, les nouvelles élites du capitalisme avancé manifestent en effet……à mesure que leur pouvoir s'accroît et se mondialise, un mépris grandissant pour les valeurs et les vertus qui fondaient autrefois l'idéal démocratique. Chaque jour devient plus manifeste leur incapacité dramatique à comprendre ceux qui ne leur ressemblent pas: en premier lieu, les gens ordinaires de leur propre pays.», de celles de Jacques Julliard « Ces écrivains et ces essayistes se rapprochent du peuple réel à mesure que le parti socialiste s’en éloigne….Ce qu’ils reprochent à la gauche c’est de s’inventer de nouveaux prolétariats au détriment du prolétariat réel ».

Michel Onfray avait beau jeu samedi soir chez Ruquier, encore, de répondre à un Yann Moix hystérisé : « c’est vous qui faites le lit du FN ».

Ces intellectuels, que le Monde qualifie «à la dérive», estiment que cette dictature de la «bien-pensance» est le fait d’une génération qui a été formée par le French Theory : « C’est un mouvement de civilisation... L’erreur des intellectuels, des philosophes… ceux dont on dit qu’ils sont la french theory outre-Atlantique, c’est-à-dire les Deleuze, les Foucault, les Guattari, les Derrida etc., ont déliré, ont déliré. Et intellectuellement ça produit encore des effets chez Najat Vallaud-Belkacem par exemple » (Michel Onfray, débat avec Eric Zemmour, le Point).

Il se trouve qu’un roman, « La 7è fonction du langage », prix du roman Fnac, vient d’être consacré à cette génération d’intellectuels qui ont dominé le monde universitaire des années 70/80, les structuralistes, mieux nommés « déconstructivistes ». Ce récit, sous forme d’une enquête policière jubilatoire transformant le suicide de Roland Barthes en son «assassinat » à la sortie d’un déjeuner avec François Mitterrand, nous donne des portraits irrésistibles des protagonistes de la French Theory (entre autres les exploits de Michel Foucault dans les saunas gays….), ainsi que de Sollers et BHL (qui n’auraient pas apprécié…). L’auteur, Laurent Binet, étant, à ce que j’en sais, plutôt proche de le la gauche «bien-pensante», il faut sans doute plus voir dans cet ouvrage un hommage en forme d’initiation ludique à un mouvement de pensée exceptionnel, qu’une mise en pièce du structuralisme et qu’il fasse siennes ces paroles de Michel Onfray : « La mauvaise chose c’est que la destruction de valeurs qui avaient fait leur temps, n’a pas été remplacée par des valeurs nouvelles, c’est-à-dire que ce moment de négativité qu’a été mai 68 aurait dû être suivi par un moment de positivité qui n’a pas eu lieu. Donc je dis oui à ce moment de négativité parce qu’on ne peut pas dire non au réel… C’est un mouvement de civilisation... ».

Michel Foucault qui interviewé en 1979, à une époque où il s’enthousiasmait pour la révolution iranienne, disait à propos de l’arrivée massive des boat people vietnamiens « Les hommes réprimés par la dictature choisiront d’échapper à l’enfer…..Je crains que ce qui se passe au Vietnam ne soit pas seulement une séquelle du passé, mais que cela constitue un présage de l’avenir ». Il n’avait pas imaginé le changement d’épistémè !

Je reste un tant soit peu nostalgique de ces années de «déconstruction» ( pas seulement sur le plan « philosophique »…), mais je suis de ceux qui se demandent parfois si elles ne nous ont pas mené dans une impasse.

«La liberté, c'est la liberté de dire que deux et deux font quatre. Lorsque c'est accordé, le reste suit.»

(Orwell, 1984)

De la French Theory à l'univers orwellien
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20 août 2015 4 20 /08 /août /2015 14:15
Sitges, la crise?

Mykonos l’an dernier n’avait été qu’une entorse à mon habitude de passer avec Bertrand mes vacances d’été à Sitges, non sans profiter du long parcours en voiture pour faire étape dans des sites remarquables du sud de la France.

Nous découvrîmes d’abord Collonges-la-Rouge, village médiéval de la Corrèze, sans oublier de visiter les deux autres petits bourgs qui l’entourent et que sa réputation éclipse, Curemonte, superbe sous le sous le soleil couchant de cette fin juillet et Turenne et son château. Inutile de préciser que les soirées y sont calmes, d’autant que les plus proches contacts « Grindr » sont à Brive….

Le lendemain nous atteignîmes la plus belle ville de France selon Victor Hugo ("Prenez Anvers, ajoutez-y Versailles, et vous avez Bordeaux") pour y passer deux jours, le temps d’amorcer notre bronzage sur la plage gay du Porge, de revenir déguster un de ses savoureuses pizzas chez «Jacomo», restaurant certes moins fréquenté par les gays qu’il ne fût, mais dont la patronne est toujours aussi truculente, de faire mes premiers pas dans un nouveau bar, le Lefko, dans le centre de cette ville qui m’a vu naitre, où je reviens pourtant tous les mois mais dont l’ouverture m’avait échappé et d’y apercevoir un de mes tricks d’il y a plus de 30 ans…

Le départ pour Biarritz, imprudemment un 1è aout, se fit en évitant sagement de quitter Bordeaux par l’autoroute envahie par des hordes de vacanciers, ce qui nous permis d’arriver à temps pour passer l’après-midi à la célèbre plage «des 100 marches» à Bidart, très courue par les gays, dont l’accès se méritait particulièrement en ce jour caniculaire. Il était impensable de revenir au pays basque, qui a bercé mes vacances d’enfant et d’adolescent, sans aller diner "Chez Pablo" à Saint Jean de Luz, restaurant que j’ai découvert avec mes parents...La "vieille" n’est plus là depuis longtemps, sa nièce a repris le flambeau, mais les chipirons à l'encre sont toujours à se rouler par terre...Le soir, un verre pris à la terrasse du Bô bar, bar gay branché de Biarritz, me permis de jeter un œil nostalgique à la discothèque « Le caveau », à quelques mètres, qui fut en son temps un lieu gay mythique et où j’ai eu passé des nuits torrides…il y a si longtemps.

Il ne nous restait plus qu’à franchir la frontière à Irun et à rejoindre Sitges via les autoroutes espagnoles, évitant ainsi le Pertus et ses bouchons interminables ainsi que le risque de perdre des points de permis….Notre premier réflexe fut de faire un tour de la ville pour constater ce qui avait changé par rapport à l’année précédente. Nous avons été stupéfait du nombre de fermetures d’établissements : la charcuterie d’où nous ramenions toujours un savoureux jambon; le restaurant « Ma maison », une institution très gay friendly ; le restaurant «El Trull» ; la discothèque « L’Atlantida » où se déroulaient les nuits blanches et les « gays beach party »; le petit commerce d’alimentation de la rue principale où l’on se ravitaillait en eau…Ma première réaction fut d’invoquer la crise qui a sévèrement affecté l’Espagne mais les «locaux» nous ont presque à chaque fois donné une autre raison : retraite, malversation financière, problème personnel du patron, fermeture administrative…Sinon, pas de changements majeurs par rapport aux billets précédents consacrés à cette ville, tout s’organisant, depuis la fermeture du Mediterraneo, dans les bars et discothèques à proximité du célèbre Parrot, la terrasse gay incontournable. Lady Diamond, dont l’embonpoint s’est accentué, continue à faire spectacle dans les bars et restaurants sans beaucoup changer son répertoire…

Un peu moins de monde cette année, m’a-t-il semblé, surtout moins d’habitués du marais, l’ambiance y est toujours aussi chaude. Je n’ai plus l’énergie (ou l’envie ?) nécessaire pour participer aux très tardives soirées mousse de l’Organic ou aller finir mes nuits sur la plage où je n’ai donc pas pu vérifier si la drague y était toujours aussi active, mais les bars sexe, notamment le très populaire Bukkake, sont accessibles à des heures certes avancées mais plus raisonnables et les réseaux sociaux, Grindr, Scruff, gayromeo, Hornet, fonctionnent au maximum, permettant de cueillir ici tel jeune barcelonais venu passer la journée ou là de ne même pas quitter son hôtel en changeant juste de chambre….

Alors que je faisais part sur mon « mur » Facebook de mon plaisir de retrouver un de ces endroits de plus en plus rares qui résistent à l’uniformisation galopante que tente de nous imposer la génération anti-communautariste du « mariage pour tous », un de mes «amis» s’étonna en commentaire qu’on puisse parler de « résistance à l’uniformisation» au paradis des clones. Il avait sans doute oublié qu’à Sitges, loin de l’indifférenciation, ce serait plutôt la guerre des clones : bears, cuirs, crevettes, gymqueens, vieilles tantes décaties, etc…. Les hipsters barbus, symptômes accablants de cette maladie, « le mimétisme hétérosexuel », qui frappe de plus en plus de jeunes gays parisiens ne sont pas ici l’espèce dominante…

Après 9 nuits à Sitges, avant de regagner Paris, il est sage de prévoir une étape de repos. Cette année c’est saint Antonin Noble Val, petit village médiéval et familial du Tarn et Garonne qui nous a servi de « sas de décontamination », non sans avoir pris le temps de nous arrêter un instant pour visiter l’impressionnante abbaye Saint-Michel de Gaillac. Le temps n’était malheureusement pas au rendez-vous, ne permettant pas de profiter comme on l’aurait voulu du magnifique spectacle des gorges de l’Aveyron, mais nous avons pu découvrir Penne et son château en pleine restauration où l’on peut observer les tailleurs de pierre en action, ainsi que l’abbaye cistercienne de Beaulieu.

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7 juillet 2015 2 07 /07 /juillet /2015 12:33
Adieu gay Pride?

L’enthousiasme des années de « braise » s’en est allé. Le soleil était cette année au rendez-vous, mais cela n’a pas suffi à enrayer le déclin de la Gay Pride parisienne qui n’attire plus les foules et qui a perdu le sens de la fête depuis au moins 2 ans, date de l’adoption du mariage pour tous…Simple coïncidence, réelle démotivation après la satisfaction d’une revendication majeure ou lassitude devant une politisation jusqu’auboutiste de la direction de la LGBT? Combien d’entre nous se sentent concernés, si ce n’est une infime minorité, par la cause des transsexuels, la pseudo théorie du genre, ou la GPA ? Le slogan choisi cette année, «multiples mais indivisibles», pouvait prêter à sourire. Multiples certes, mais indivisibles vraiment? Il suffit de jeter un coup d’œil à ce qui se dit sur les réseaux sociaux gays ou de constater l’attrait qu’exerce le front national sur certains d’entre nous au point d’y militer, pour dévoiler son côté dérisoire. Cette radicalisation idéologique a tué la dimension carnavalesque de l’évènement. La fête s’est réfugiée, le soir, dans les rues du marais autour des bars qui, expulsés du défilé depuis des années, continuent, pour combien de temps encore, d’en faire un moment de réjouissance.

Quel contraste avec la 23ème fête de rue gay à Berlin la semaine précédente, à quelques pas de l’hôtel ou je résidais pour un congrès de neurologie, immense kermesse gay dans le quartier gay de Schonberg : multiples stands, talk-show, défilé de personnalités du monde du spectacle, de la culture et de la politique, pistes de dance, etc. Quel contraste avec l’immense foule qui a envahi les rues de Madrid pour fêter les 10 ans du mariage gay.

L’actualité était pourtant propice pour faire de cette Gay Pride une célébration des toutes récentes victoires historiques concernant le mariage homosexuel : le oui massif de l’Irlande catholique, si massif qu’il en a ébranlé Nicolas Sarkozy, et la contribution décisive du juge de la cour suprême, Anthony Kennedy, conservateur et catholique, à sa légalisation aux Etats Unis…Il semble bien qu’il n’y ait qu’en terre chrétienne, ou du moins judéo-chrétienne, que puisse se dérouler une Gay Pride, puisque celle d’Istanbul, la seule à ma connaissance en pays islamique, venant d’être violemment réprimée. Une occasion pour rapporter ces propos du Pape, passés inaperçus, lors d’un voyage à Turin : « Les Alliés avaient les photos de lignes de chemin de fer qui menaient aux camps où étaient assassinés les Juifs, les homosexuels, les Roms. Pourquoi n’ont-ils pas bombardé ces lignes de chemins de fer ?»…

Des années après leur séparation, un couple dont le fils, homosexuel, qu’ils ont abandonné, s’est suicidé quelques mois auparavant à San Francisco, se retrouvent dans « la vallée de la mort » après la réception de deux lettres qu’il leur a envoyé pour les inviter à se réunir dans ce lieu où il affirme qu’il leur apparaitra. Au-delà de la performance de Depardieu, surtout, et d’Isabelle Huppert, il semble que la dimension spirituelle –culpabilité, remords, rédemption - quasi christique dans sa scène finale, du dernier film de Guillaume Nicloux, Valley of love, ait contribué à l’accueil plutôt tiède, voir hostile, de la critique. Il m’a au contraire profondément touché, émotion renforcée par la beauté de la musique lancinante et les interrogations sans réponse, comme le rôle de l’homosexualité, à peine évoquée, de Mickael.

Pour terminer ce billet, quelques lignes extraites du passionnant livre de Raphaelle Bacqué sur la vie fulgurante mais fascinante de Richard Descoings, ancien directeur de Sciences Po, mort mystérieusement dans une chambre d’hôtel de New York, souffrant d’une bipolarité exacerbée par la drogue et l’alcool, et acteur de ces années de « braise» précédemment évoquées :

« Dans cette nouvelle société de la nuit et de la fête, les homosexuels animent la plupart des scènes à la mode. C’est un mouvement joyeux qui s’avance sans poing levé, mais en dansant sur la musique disco….Tout le monde couche avec tout le monde dans une douce odeur de poppers. C’est follement gai, terriblement mondain et somptueusement décadent.

Depuis qu’il s’autorise à vivre comme il l’entend, une fois la nuit venue, Richard a le sentiment d’avoir goûté à une drogue inconnue et puissante. …Le soir, lorsque le sage énarque enlève son costume et sa cravate pour enfiler un pantalon de cuir et un tee-shirt moulant et plonger dans la nuit, il ne sait plus très bien quelle tenue est un déguisement…..

« Je suis homosexuel pour ceux qui savent et hétérosexuel pour ceux qui n’ont pas besoin de savoir ! » »

(Richie, Raphaëlle Bacqué, Grasset, 2015)

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3 juin 2015 3 03 /06 /juin /2015 14:20
Catholique zombie ou sociologiquement non pertinent?

De retour de mon périple vacancier qui m’a amené du « village-pâtisserie» de Füssen, au pied des châteaux de Louis 2 de Bavière qui inspireront Disneyland, jusqu’à Prague la baroque, en passant par Munich, Salzbourg, Vienne, et Budapest, autant d’étapes qui ne permettent pas de douter des racines chrétiennes de l’Europe, j’ai découvert la une de l’observateur, « le brulot Todd », qui annonçait un retour fracassant du débat intellectuel.

Un livre d’Emmanuel Todd ne m’a jamais laissé indifférent depuis qu’il a accédé à la célébrité en prédisant, dès 1976, l’effondrement de l’union soviétique, en se basant sur des analyses statistiques telles que le taux de suicide et surtout la mortalité infantile. J’ai commencé à le lire à cette époque-là, avec le « Fou et le prolétaire », livre parenthèse dans lequel il abandonnait son approche «scientifique» pour donner une analyse psychologique du totalitarisme comme conséquence de «l’aliénation mentale» d’une partie de la société. Il n’allait pas tarder à revenir à sa méthodologie initiale, en y intégrant l’analyse des structures familiales (famille nucléaire, famille souche, etc…) et leur lien avec les systèmes idéologiques et l’évolution de l’électorat. Cette approche «systémique» de l’idéologie basée sur l’anthropologie familiale, comme auparavant celle du « désir » par René Girard basée sur le mimétisme, ne pouvait que séduire le « rationaliste déterministe » que j’étais (et que je suis sans doute encore..), voyant là une extension aux sciences humaines de la quête des physiciens d’une théorie du « tout ». Si la solidité d’une théorie repose en grande partie sur ses capacités « prédictives », Todd a quelques jolis succès à son actif depuis celui de la chute du communisme: déclin de l’empire américain, crise financière, fracture sociale, révoltes arabes…Au point de prendre la posture de « Je suis celui qui sait ». Malheureusement son approche «scientifique» est parfois pervertie par son «aliénation» idéologique, celle de la gauche radicale…Je me souviens ainsi de sa «prévision» durant la campagne présidentielle de 2007 selon laquelle Sarkozy finirait à 16%.....

C’est donc avec intérêt que je me suis lancé dans la lecture de «Qui est Charlie». Mon intention n’est pas ici de me livrer à un commentaire approfondi de ce livre passionnant, qui donne à réfléchir et à prendre un certain recul par rapport à qu’on a vécu, mais de dire qu’il n’a pu emporter mon adhésion tant les dérives interprétatives de nature idéologique, quasi paranoïaques, affaiblissent le propos. Je suis prêt à concéder - même si cela n’est pas confirmé par un récent sondage sur la participation aux manifestations et que la peur d’un attentat comme facteur non négligeable - j’ai pu le constater dans mon entourage- de non-participation n’est jamais prise en compte - que les manifestants étaient plus nombreux dans les régions périphériques de tradition catholique à structure familiale inégalitaire, que dans les régions centrales de tradition athée et révolutionnaire à structure familiale égalitaire (qui basculent actuellement vers le vôtre FN), que les classes supérieures et moyennes, en état «de vide métaphysique» tendent au laïcisme radical et à l’exclusion des ouvriers et des musulmans. Mais comment souscrire aux affirmations péremptoires d’une «monnaie unique» substitut au «Dieu unique» des populations autrefois catholiques, d’une religion musulmane estampillée comme la religion des faibles et des opprimés (dans nos banlieues tout au plus…), d’un blasphème considéré comme naturel lorsqu’il vise sa propre tradition religieuse (chrétienne), mais lâche et méprisable quand il est dirigé vers la religion des faibles (ce qui revient à reconnaître nos racines chrétiennes…et à invoquer un passé colonial inexpiable), enfin et surtout d’une manifestation du 11 janvier traduisant un inconscient « islamophobe». Je suis peut-être un « catholique zombie » - « peut-être » car l’auteur désigne par là des « athées » de culture catholique, alors que je suis agnostique, ce qu’il considère comme « sociologiquement non pertinent» - mais il ne fait aucun doute pour moi que j’aurais manifesté de la même façon s’il s’était agi d’un acte terroriste perpétré par des catholiques intégristes ou une secte protestante.

On comprend sans peine que ce livre stimulant ait pu amener Alain Finkielkraut ou Eric Zemmour à polémiquer, ou que la gauche « bienpensante » et que nombre des « Je suis Charlie » se soient indignés, mais on aurait peut-être pas imaginé que c’est au sein même de la «gauche radicale», notamment chez ceux qui comme Michel Onfray ou Régis Debray ont récemment mis au centre du débat l’importance du fait religieux, que des oppositions si vives allaient se manifester.. L’excellent thriller de Víctor Del Arbol, « Toutes les vagues de l’océan », dont les protagonistes sont en grande partie des militants communistes pendant la révolution russe et la guerre civile espagnole, peut nous faire entrevoir jusqu’à quels extrêmes peuvent mener les luttes idéologiques dans cette mouvance radicale….

Quelques lignes extraites du livre de Gilbert Keith Chesterton, « La chose, pourquoi je suis catholique » qui vient de reparaître, pour conclure ce billet :

« Le monde moderne n’est pas mauvais : à certains égards, il est bien trop bon. Il est rempli de vertus féroces et gâchées. Lorsqu’un dispositif religieux est brisé (comme le fût le christianisme pendant la réforme), ce ne sont pas seulement les vices qui sont libérés. Les vices sont en effet libérés, et ils errent de par le monde en faisant des ravages ; mais les vertus le sont aussi en faisant des ravages plus terribles. Le monde moderne est saturé de vieilles vertus chrétiennes virant à la folie. Elles ont viré à la folie parce qu’on les a isolées les unes des autres et qu’elles errent indépendamment dans la solitude »

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1 mai 2015 5 01 /05 /mai /2015 17:32
"Par dessus l'épaule de Dieu"

Dans l’avion qui me ramenait de Bordeaux, assis à côté d’un passager qui venait de commander, en fin de matinée, un jus de pomme avec biscuit sucré, alors qu'il s'était agi pour moi d'un jus de tomate accompagné de salé, me confortant dans l’idée qu’ il y avait bien deux mondes, j'ai eu le loisir terminer le dernier roman de Jérôme Ferrari " le principe" , prix Goncourt pour son précédent, biographie imaginaire du prix de Nobel de physique Werner Heisenberg, un des pères fondateurs de la mécanique quantique, qui énonça le fameux principe d’incertitude selon lequel on ne peut déterminer avec une précision absolue à la fois la vitesse et la position d'une particule élémentaire, ouvrant ainsi la voie à une révolution théorique sans doute encore plus fondamentale que celle de la relativité générale. Roman philosophique en forme d'interpellation du physicien sur sa vie, par un jeune étudiant en philosophie qui n'est autre que l'auteur : comment celui qui a tenté de regarder « par-dessus l'épaule de Dieu » en réussissant à lever le voile sur la façon dont se comporte l’infiniment petit, a-t-il pu montrer tant de complaisance envers le régime nazi en acceptant de participer au programme nucléaire du Reich? Comme si, par une généralisation du dit principe, une plus grande lucidité dans un domaine, ici celui du monde atomique, était corrélée à un aveuglement dans un autre, là le problème du mal, aveuglement dont le film "Le labyrinthe du silence" nous révèle que nombre d'allemands auraient préféré voir échapper au devoir de mémoire. Ce grand roman, écrit superbement, demande cependant pour en savourer toutes les nuances, un minimum de familiarité avec les concepts de la mécanique quantique…

Si les grands textes religieux sont censés nous délivrer « la parole » de Dieu, son interprétation se fait aussi «par-dessus son épaule». Le regard que porte un réalisateur originaire du monde musulman sur l’évangile, en ces temps où nombre de chrétiens y sont persécutés, à travers le personnage de Judas, est un des plus originaux depuis le film de Pasolini « l’évangile selon Saint-Mathieu ». Derrière une réhabilitation de Judas, qui ne serait pas le traître colporté par la mémoire collective, mais un disciple fidèle, trop peut-être, « Histoire de Judas », nous donne un version très réaliste de l'évangile, filmée avec une grande simplicité, peu de dialogues - à l’exception de la scène fascinante de la confrontation entre Jésus et Pilate-, peu d’épisodes relatés, mais exemplaires comme celui des marchands du temple, ou surtout celui de la femme adultère en raison des origines arabes de l’auteur. Un très beau film.

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25 mars 2015 3 25 /03 /mars /2015 16:42
Du déni du réel à sa caricature

Même si Jean-Jacques Goldman est à la chanson française à texte ce qu’Amélie Nothomb est à la littérature, on a du mal à comprendre comment les paroles de sa dernière création pour les enfoirés, ni meilleure, ni pire que les autres, ait pu susciter une telle polémique jusqu’à amener Jacques Attali à sortir de son champ d’expertise ! Twitter et ses avatars sont devenus un effroyable « Big Brother » technologique permettant à la doxa du politiquement correct de mettre sur pied une police de la pensée dont les moyens ne sont plus la prison (du moins pas encore...), comme dans le roman de Georges Orwell, mais le lynchage médiatique…

Ce système de contrôle, piloté par la sphère médiatico-intellectuelle, fonctionne sur le déni du réel au nom d’un humanisme basé sur les valeurs des Lumières et de l’idéologie égalitaire post- soixante-huitarde. L’actualité récente démontre l’efficacité redoutable de ce système. Nous sommes ainsi fermement priés de qualifier les 21 victimes de Daesh en Egypte, de « ressortissants » égyptiens et non de « coptes », c’est-à-dire de chrétiens : les islamistes radicaux seraient des « produits de notre société » (selon l’expression d’Eddy Plenel), victimes de l’exclusion sociale et de nos antécédents colonisateurs , mais il ne saurait être question d’accorder ce statut de victime à des chrétiens au risque d’admettre que ces fanatiques islamiques sont en fait des produits de leur religion. De même, la pression de la doxa médiatique est si forte que Laurent Ruquier nous a donné le pitoyable spectacle d’un peu courageux retournement de veste en déclarant regretter d’avoir donné la parole à Eric Zemmour qui a pourtant fortement contribué au succès de son émission, sans même s’apercevoir, comme l’a justement remarqué Jean-François Kahn, qu’Éric Caron, virtuose du déni du réel, joue bien plus ce rôle de facilitateur du vote Front National que celui qu’il a remplacé (du moins « virtuellement » car on imagine mal que cette émission, temple de la bien-bien-pensance bobo, puisse être suivie par de potentiels électeurs du FN…).

Comment s’étonner que cette persévérance dans le déni du réel ait pour conséquence que ce dernier prenne sa revanche en prenant le masque de sa caricature qu’en donne le FN et une partie de l’UMP. Car ce réel quotidien que vivent les populations les plus exposées et que l’idéologie de gauche tente désespérément d’occulter, elles le perçoivent dans la caricature qui lui est substituée et se jettent de plus en plus nombreuses dans les bras de ses promoteurs.

Ceux à gauche qui tentent de regarder la réalité en face, comme Malek Boutih ou Michel Onfray (je suis loin de partager nombre de ses positions, mais ce n’est pas le sujet), sont aussitôt accusés de réhabiliter un discours d’extrême droite…Et puis il y ceux qui comme Manuel Valls sont sur une position schizophrénique : incontestablement dans le camp des réalistes sur le plan économique et sur la question sécuritaire, mais encore dans le déni sur la plan de sa phraséologie qui reste imprégnée de la vulgate humaniste gauchisante quand il s’en prend à Houellebecq ("La France ce n'est pas Michel Houellebecq ») qu’il n’a manifestement pas lu, où à Michel Onfray (accusé de "perdre les repères" et de « préférer l'intellectuel de la Nouvelle droite, Alain de Benoist, à l'intellectuel présenté comme étant de gauche Bernard-Henri Lévy »). Certes il lui faut composer au moins sur le plan du langage avec les «frondeurs», mais pour que la France évite de « se fracasser contre le mur de l'extrême ... du Front national », ce qui est «dit» et plus immédiatement perçu que ce qui «est fait».

"S’il faut une explication de texte à Manuel Valls (...) je disais que, moi qui suis de gauche, je préférais une idée juste, fut-elle de droite, à une idée fausse même si elle est de gauche, surtout si elle est de gauche. Quel philosophe, quel citoyen même, pourrait soutenir le contraire d’ailleurs, sauf à préférer l’erreur et le faux pour des raisons idéologiques ?"

(Michel Onfray, interview au Huffington Post, 2015)

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18 février 2015 3 18 /02 /février /2015 15:29
Une mémoire "gay"

Il y a 5 ans, dans un billet intitulé «Une mélancolie gay» (http://limbo.over-blog.org/article-une-melancolie-gay-47494201.html), j’avais tracé l’évolution de la géolocalisation de la visibilité gay à Paris, autrement dit de nos « territoires », non sans m’interroger sur ce que l’avenir nous réservait : «La flèche du temps, celle du droit à l’indifférence, nous amènera-t-elle, comme pour notre univers selon certaines hypothèses, du big bang au big crunch, de la visibilité à l’invisibilité, retour à l’isolement initial?». Lorsque j’ai écrit ce billet, si j’avais eu connaissance des études sociologiques de plusieurs intellectuels espagnols dont j’ai rendu compte (http://limbo.over-blog.org/article-adapte-toi-a-notre-homophobie-ou-de-l-heterosexualisation-de-l-homosexualite-109687347.html), j’aurais sûrement relié cette évolution territoriale aux étapes qu’ils ont identifiées de la constitution de l'identité gay à la fin du 20è siècle.

La rue Saint Anne symboliserait ainsi la période pré-gay qui se clôt avec l’élection de François Mitterrand et la rue des Archives la période gay, dont le déclin date de l’adoption du Pacs et qui s’est éteinte avec l’élection de François Hollande et le « mariage pour tous ». La période post gay s’annonçant comme celle de la déterritorialisation et des réseaux sociaux, elle n’aura donc probablement pas sa rue. Libération, il y a quelques semaines, titrait « le gay passé », à propos de transformation accélérée du Marais, qui voit peu à peu se fermer ses commerces gay ou gayfriendly, au profit de boutiques « prêt à porter » haut de gamme, sous l’impulsion du BHV? On en connait les raisons : les gays ont accéléré la rénovation de ce quartier favorisant l’explosion des prix de l’immobilier et des loyers au-delà de leurs moyens et les nouvelles générations, de mieux en mieux « intégrées », ne ressentent plus la nécessité de se regrouper dans des lieux communautaires. Le Cox, dont la fermeture marquerait sans doute le signal de la fin d’un des derniers « villages gays» en terre chrétienne – y en a-t-il jamais eu ailleurs ?- a célébré son anniversaire par un décor provocateur où un panneau « vendu » s’accompagnait d’un relookage du bar sous un décor, « Charnel », parodie d’une marque de haute couture. Paris n’est pas un cas isolé, Soho à Londres subit la même évolution et Castro à San Francisco ou Greenwich à New York se sont éteints il y a déjà des années. Les auteurs de ces messages récurrents- «cherche mec hors milieu»- qui fleurissent sur les profils internet, ne semblent pas s’être rendu compte de leur anachronisme….

Le billet « une mélancolie gay » témoignait d’une certaine nostalgie de ces folles années 80, bientôt les années Sida, de leur vent de libération sexuelle, de leur musique, de ma jeunesse peut-être…Le racisme antivieux - «j’ai déjà un père»- qui caractérise nombre de lieux gays aurait pu me laisser indifférent à leur extinction progressive, mais si j’ai moi-même participé de ce mouvement de désertification, ne fréquentant plus les saunas, les lieux de drague en plein air et de moins en moins souvent les bars « sexe », c’est au profit d’une addiction croissante à internet amplifiée par l’apparition de Grindr et de ses clones, la multiplication des possibilités compensant ainsi largement le déficit de séduction lié à l’âge, sans parler des économies de temps et d’argent.

La déterritorialisation a ses limites. La fréquentation assidue des réseaux sociaux ne pouvant satisfaire ce manque créé par l’absence du regard de l’autre, nombre d’entre nous ont retrouvé -je fréquente à nouveau les saunas- ou retrouveront le chemin des lieux de rencontres. Il arrive même qu’il s’en crée de nouveaux, fort inattendus et insalubres, au Front National, qui est le siège d’une arrivée massive de gays au point que certains se plaignent de harcèlement sexuel...

Heureusement certains livres constitueront la mémoire de ces temps révolus, notamment le premier roman d’Alan Hollinghurst, La piscine-bibliothèque, qui vient de reparaître dans une nouvelle traduction. Ce classique de la littérature gay nous conte, au début des années 80, la mise en relation de deux générations, celle d’un un vieil homme ayant vécu à une époque où il était illégal d’être gay – le film « Imitation Game », sur la vie d’Alan Turing, vient d’en donner une illustration bouleversante- et d’un jeune dandy fortuné.

« Cela vous ennuie qu’on parle de vous comme d’un «écrivain gay» ?

Je ne prétends pas ne pas l’être. Mais le but de n’importe quel mouvement de libération est, in fine, de ne plus avoir besoin d’exister. En fait, l’Enfant de l’étranger est mon premier roman à ne pas avoir été décrit comme un livre «gay».»

(Interview d’Alan Hollighurst à libération en septembre 2013 à propos de la sortie de son dernier roman)

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28 janvier 2015 3 28 /01 /janvier /2015 16:19
L'islam et la gauche radicale

On n’ose imaginer l’exploitation qui aurait pu être faite des événements tragiques de ce début d’année si, par malheur, Nicolas Sarkozy l’avait emporté en 2012. A n’en pas douter nous n’aurions pas échappé, de surcroît, à un arsenal de lois sécuritaires liberticides, selon le principe qui était la règle sous son quinquennat : « un fait divers, une loi ». Son attitude burlesque et ridicule lors de la manifestation « je suis Charlie » devrait suffire à dissuader quiconque de lui confier à nouveau les rênes du pouvoir. Hollande et Valls ne sont pas Sarkozy, il serait temps qu’une certaine gauche se le dise et le dise, au lieu de vociférer, comme Mélenchon l’été dernier, « Hollande, c’est pire que Sarkozy».

J’ai été frappé par le regard diamétralement opposé que porte des intellectuels proches de notre « gauche radicale » sur les racines de ce qui vient de se passer. Alors que Michel Onfray s’indigne que l’on puisse envisager d’enseigner le fait religieux à l’école, Régis Debray en souligne l’absolu nécessité, précisant même que bien qu’ayant voté Mélenchon aux dernières présidentielles, il regrette que ce dernier ne comprenne absolument rien au religieux.

Le même Michel Onfray, fidèle à son dogmatisme antireligieux, l’autre soir chez Ruquier, a réitéré ses propos sur le Coran dans le texte duquel on trouverait toutes les justifications possibles aux violences commises. Cette position - sur ce point au moins (sur la théorie du genre aussi…) pas si éloignée de celle de Zemmour - selon laquelle « le problème, c’est l’Islam», est en opposition frontale avec celle d’Edwy Plennel pour qui «le problème c’est nous», affreux colonialistes blancs qui avons fait de nos immigrés des exclus (ce qui lui fait approuver, une fois n'est pas coutume, le terme d’apartheid employé par Manuel Valls…). Si Michel Onfray concéda volontiers à ses débatteurs qu’on pourrait en dire presque autant de la bible, du moins dans sa partie «Ancien testament», il réfuta avec son habituelle mauvaise foi l’objection, pourtant évidente, de la rupture fondamentale que constitue le «Nouveau testament», en brandissant comme exemple – les bras vous en tombent de la part d’un gauchiste – l’épisode des marchands du temple !! Pourtant, ne faut-il pas voir – Riss n’a pas nié la connotation lors de son interview à Europe n°1 - dans la "une" du dernier numéro de Charlie, « Tout est pardonné », un clin d’œil malicieux à nos racines chrétiennes…

Dans un récent billet, j’ai rendu compte du roman d’Emmanuel Carrère sur les origines du christianisme. Dans l’éloge qu’il vient de faire de « Soumission », le dernier Houellebecq, il a écrit qu’il considérait «tout à fait possible que l’islam soit l’avenir de l’Europe, comme le judéo-christianisme a été l’avenir de l’Antiquité». On pourrait même aller plus loin et imaginer que ce pourrait alors constituer une revanche posthume des judéo-chrétiens sur les chrétiens ! Le christianisme tel que nous le connaissons a résulté de la victoire de Paul, prônant une église universelle et déjudaïsée, sur celle de la secte intégriste de Jacques (http://blog.hyperion.gayattitude.com/20141103/Le-Royaume). Or, selon certains historiens, certaines communautés nazaréennes héritières de la pensée de Jacques, les plus radicales («les ébionites») auraient été repoussées vers l’Arabie et auraient formé l’entourage proche du futur Mahomet… L’islam conçu comme une dissidence chrétienne intégriste… (http://www.culture-arabe.irisnet.be/dissidence.htm).

François Hollande, selon des propos rapportés par son entourage dans le dernier numéro du Nouvel Observateur (rebaptisé depuis peu L’observateur), aurait eu le pressentiment, quelques jours avant les vœux, que l’année 2015 serait une année historique, comme toutes les années en 15 depuis Marignan. Cela commence en effet très fort : les attentats en France, puis la victoire de la gauche « radicale » en Grèce (peut-être pas si radicale que ça d’ailleurs…). Il est amusant de voir que, comme prévu, Mélenchon et Marine le Pen, saluent en cœur cet événement… Michel Onfray, encore lui, avait il y a peu tenté d’expliquer pourquoi, en France, c’était l’extrême droite qui caracolait en tête des sondages et non le Front de gauche : « c’est simple » comme dirait le garçon tête à claque de la publicité Renault, c’est la faute à l’Islam ! Selon lui, Mélenchon et le Pen ont des discours très proches, sauf sur l’attitude vis-à-vis de l’Islam. En d’autres termes si Mélenchon était islamophobe il ferait de biens meilleurs scores…

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12 janvier 2015 1 12 /01 /janvier /2015 23:06
"Bal tragique à Colombey : 1 mort"

La semaine même de la parution de ce titre en première page de "Hara-Kiri", le lendemain de la mort du Général de Gaulle, le ministre de l'intérieur de l'époque faisait interdire l'hebdomadaire. En ces temps là, pour tuer un journal, on employait des moyens moins sanglants qu'aujourd'hui. Une semaine plus tard, il reparaissait sous le nom de "Charlie Hebdo"..."Hara-Kiri", pour l'adolescent que j'étais, envoyait une bouffée d'air frais en ces années de plomb où j'affichais un antigaullisme viscéral. Si ma dérive socio-libérale m'a éloigné depuis longtemps de ce journal, comme beaucoup semble-t'il - sa survie n'était pas assurée - il n'en restait pas moins un des derniers bastions de la liberté de penser.

Par une étrange coïncidence, ceux qui refusaient de se soumettre sont tombés au champ d'honneur le jour de la parution du roman de Michel Houellebecq "Soumission" . Il a été peu souligné que Bernard Maris, un des martyrs de ce terrible jour, était un ami de Houellebecq et avait publié en septembre un ouvrage montrant que les romans du prix Goncourt 2010 étaient imprégnés d'une «intelligence économique» du monde contemporain... On aurait aimé que l'indignation quasi unanime qui a suivi l'attentat ne vienne pas aussi de ceux qui passent leur temps à dénoncer la "virtuelle" idéologie meurtrière de Houellebecq ou Zemmour (l'amalgame est d'ailleurs plus que contestable..), tout en trouvant des excuses à celle très "réelle" de l'islam radical, comme en témoigne le soutien très appuyé de notre Fouquier-Tinville moderne, Edwy Plennel, aux propos de l' ex-otage Pierre Torres sur son tortionnaire djihadiste : «Mohammed Nemmouche est un pur produit occidental, labellisé et manufacturé par tout ce que la France peut faire subir à ses pauvres comme petites humiliations, stigmatisations et injustices. L’empilement sans fin de nouvelles lois antiterroristes en est l’une des facettes». Ecœurant... Au moins Jean Marie Le Pen a eu, lui, le courage de ne pas se dédire en affirmant "Je ne suis pas Charlie", justifiant ainsi, à posteriori, la non invitation de son parti à manifester dimanche.

Il ne reste plus qu'à espérer que ces attentats ne se retournent pas contre les musulmans, ce qui est sans doute un des objectifs des commanditaires de ces malades mentaux, contribuant ainsi à transformer en prophétie "auto réalisatrice" les écrits de Zemmour quant au risque d'une guerre civile dans nos banlieues. Le très beau film "Timbuktu" en compétition à Cannes, montre admirablement comment les musulmans sont les premières victimes de la dérive sectaire de certains d'entre eux. Ce qui ne devrait pas empêcher les intellectuels musulmans de s'interroger sur les racines de ce mal qui ronge cette religion, comme dans cette "lettre aux musulmans", d'Abdennour Bidar, parue dans le Huffpost : http://quebec.huffingtonpost.ca/abdennour-bidar/lettre-au-monde-musulman_b_5991640.html. Car le refus de suivre la minute de silence dans de nombreuses écoles, nombre de réactions sur les réseaux sociaux, et peut-être symptomatique la faible mobilisation pour la manifestation de dimanche à Marseille -un quart de la population est musulmane - témoignent d'un soutien, au moins passif, qui va bien au-delà des djihadistes...

Du temps de Hara-Kiri, nous manifestions en criant "CRS-SS", hier nous les avons applaudis....

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16 décembre 2014 2 16 /12 /décembre /2014 21:45
L'âge, le sexe, le sida

J’avais découvert avec stupéfaction, lorsque je me suis inscrit au marathon de Paris, il y a 12 ou 13 ans, que la catégorisation en fonction de l’âge des fédérations sportives était aussi sévère que celle du milieu gay : j’étais donc, déjà, un senior, aujourd‘hui un …vétéran…

Pourtant ces seniors seraient de plus en plus performants au marathon (j’avais réalisé 3h37…), alors que les temps des plus jeunes ne progressent pas, selon une étude de chercheurs de l’Inserm sur celui de New York. Si l’on en croit les résultats d’une autre étude que vient de publier le Lancet, les seniors auraient également plus souvent eu une expérience homosexuelle que les jeunes, du moins si l’on compare les 55-64 ans au 16-24 ans…Ces expériences sexuelles pourraient même être plus nombreuses que ne le croient ces jeunes gays qui chassent sur les réseaux sociaux en affichant des profils particulièrement « bienveillants » pour leurs ainés – «merci j’ai déjà un père, voire j’ai déjà un grand-père…»- si l’on se réfère aux statistiques de dépistage du sida qui montrent un pourcentage sans cesse croissant d'hommes fort "matures", notamment à partenaires multiples. Non seulement ils multiplient les rencontres, mais en plus, comme les plus jeunes, ils ont tendance à se passer de préservatifs…Il est vrai que certains d’entre eux ont connu la glorieuse période de « l’avant » et la nostalgie est la plus forte…

On peut avancer sans crainte de se tromper que les progrès thérapeutiques vont accentuer cette tendance au "bareback". Le conseil national du sida avait déjà évoqué la possibilité de ne pas utiliser de préservatifs pour les couples sérodivergents si le partenaire séropositif traité avait une charge virale indétectable (http://limbo.over-blog.org/article-sida-une-education-de-l-incertitude-49758130.html), caractéristique que l’on voit apparaitre ici ou là dans les profils sur les réseaux gay de rencontres ( je trouve d'ailleurs très discutable cette incitation appuyée et sans cesse renouvelée de certains sites de rencontre, tel Hornet, à afficher son statut HIV "daté"...). On vient de franchir un pas avec la démonstration de l’efficacité préventive très élevée d'une prise « à la demande » de l'antirétroviral Truvada quelques heures avant et après le rapport, attitude recommandée par l’OMS pour les individus à risque…

A ma connaissance la molécule n’est pas encore disponible en France, mais quand elle le sera, on peut douter que l’assurance maladie admette cette pratique « de confort » (c’est vrai sans capote c’est plus confortable…) au remboursement. D’autant plus que tant qu’on y est, pourquoi ne pas mettre aussi en place un traitement « curatif », sans dépistage, d’une potentielle infection syphilitique ou à chlamydia, passée inaperçue, par une prise annuelle (très efficace aussi) de 15 jours d’un traitement par tétracyclines !

Ce billet sur les seniors me donnent l'occasion de signaler un film particulièrement touchant, « Love is strange »,sorti presque confidentiellement, mais heureusement salué par la critique. Il nous conte les conséquences désastreuses du mariage d’un vieux couple gay dont l’un des partenaires va perdre son emploi de professeur de musique dans une institution catholique, son homosexualité, parfaitement connu et tolérée jusque-là ne l’étant plus une fois officialisée (Florian Philippot saura bientôt si le Front National se conduit moins hypocritement que l'Eglise!). Mais il ne s'agit beaucoup moins d'un film militant -les gays y sont montrés plutôt bien insérés dans la société newyorkaise - que d'une histoire d'amour qui porte un regard tendre sur la place des seniors dans la société et sur les rapports entre générations. Autre film émouvant et troublant, "Something must break", du Suédois Ester Martin Bergsmark. Une histoire d'amour encore, celle d'un personnage complexe, Sebastian, adolescent androgyne qui voudrait être Ellie, la fille qu'il sent en lui, et donc la rencontre avec Andreas va illuminer, un temps, sa vie. Mais Andreas n'est pas "gay" et Sébastian, s'il s'habille en fille, ne veut pas en devenir une "physiquement"....Les scènes de sexe sont d'une beauté troublante, inhabituelle. Film bien plus convaincant sur le genre que celui d'Ozon ("une nouvelle amie") qui m'a laissé relativement indifférent, en dépit de l'interprétation de Romain Duris.

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