Prendre un TGV pour la Bretagne un vendredi de décembre, lendemain de grèves ? Un retard assuré et une promesse de pluie… Point de déception donc d’une arrivée à
Saint Malo, différée d’une trentaine de minutes, sous une pluie battante. Un scénario assez semblable à celui de l’année dernière pour une réunion identique, mais à Rennes cette fois-là, où des
trombes d’eau étaient tombées toute la nuit. Les conditions météorologiques ne permettaient pas d’envisager une exploration de la vie nocturne de ce charmant village, mais de toute façon que peut
il y avoir à faire à Saint-Malo une nuit de décembre ? Même les logiciels de drague « de proximité », Grindr and co, ne signalaient pas une forte densité « gay » dans un rayon de quelques
kilomètres au point que certains autochtones, las sans doute d’une telle désertification, seraient presque prêts à se « farcir » plusieurs dizaines de kilomètres pour satisfaire leurs besoins
physiologiques. J'ai été touché par leur attachement à leur terroir, tel cet internaute qui m’a demandé « tu es là en vacances? »…. Je n’y ai pas aperçu non plus de représentants - « les bonnets
rouges » ici, « tondus », « pigeons » ailleurs- de cette France « mal pensante », « girondine », celle des « actifs », petits entrepreneurs et commerçants, celle de la révolte fiscale qui se
transforme en révolte sociale ( jusqu’à s’étendre aux professeurs des grandes écoles ?), révolte bien différente de celle qu’espérait ce pauvre Mélenchon qui rêvait d’une nouvelle prise de la
Bastille…
De retour sur Paris juste à temps pour participer dimanche en fin d’après-midi, invité par un ami, sans doute le futur témoin de mon mariage, au tout nouveau « gay
tea dance » (« Just Dance »), rue Saint Fiacre, dans un local de l’entreprise dans laquelle il travaille. Si ma mémoire ne me fait pas défaut, mon précédent « gay tea dance » doit remonter à plus
de 20 ans, du temps des dernières années du « Palace » à quelques mètres de là ….L’occasion de croiser quelques « figures « du milieu gay parisien, celui des « clubbers » (figures perdues de vue
depuis longtemps, pour la plupart), voire quelques « tricks », du moins ceux que j’ai réussi à reconnaitre en dépit des inexorables altérations du temps.
Le week-end précédent nous avions assisté, Bertrand et moi, à notre premier mariage gay, celui de deux de ses plus vieux amis, cadres supérieurs d’une grande firme,
qui s’unissaient après 33 ans de vie commune en la mairie très « gay friendly » du 16è arrondissement. Le maire bien sûr n’était pas là, mais un de ses adjoints, familier du couple, fit une très
beau discours et ne cacha pas son émotion devant le nombre de participants, parfois venus de fort loin, la salle pourtant vaste de la mairie ne pouvant suffire à les contenir…Difficile cependant
de ne pas ressentir comme "anachronique", involontairement comique, le contenu du texte officiel qui n'arrête pas de faire référence à l'éducation des enfants...Cet acte civil fut prolongée par
une cérémonie de mariage selon le rite « maçonnique »,assez grandiose, au siège d’une des grandes obédiences maçonniques, ce qui m’a donné l’occasion de pénétrer avec une curiosité distante un
univers qui m’était totalement inconnu. Les conversations que nous avons pu nouées, notamment avec plusieurs de leurs amies, lors de la réception qui s’en suivait, m’ont confirmé le caractère
volontairement « militant » de l’ampleur qui avait été donnée à cette belle cérémonie. L’occasion une fois encore d’apercevoir d’anciennes connaissances, pas toujours reconnues du premier coup
d’œil, comme ce jeune homme - en fait non, plus vraiment un jeune homme maintenant ! - qui m’aborda, sous les yeux intrigués et méfiants de Bertrand, en me disant « on se connait, tu es bien de
Bordeaux ? ». Ce n’est qu’à ce moment-là que j’ai sans hésitation identifié le jeune homme qui avait adhéré à l’association homosexuelle « Les nouveaux Achriens » (dont je fus l' un des
fondateurs sur bordeaux), en 1982, précisant qu’il était également membre de « David et Jonathan », association gay catholique….
Nous avons terminé l’après-midi en allant voir « Hunger Games », film durant lequel je me suis endormi…le champagne sans doute….Difficile de donner une opinion sur
un film que je n'ai vue que par "bribes" entre deux soulèvements de paupière. L'occasion peut-être de dire combien j'ai apprécié, quelques jours auparavant, le brillantissime film de Roman
Polanski, "La Venus à la fourrure", huit clos théâtral tout en restant du grand cinéma, entre deux acteurs magistraux, Mathieu Amalric réussissant l'exploit de finir par ressembler au
réalisateur, dont la vie privée sous la domination de la femme -Adam vaincue par Eve- est ici fantasmée.
La fin du week-end fut quelque peu assombrie par l'annonce de la mort de Peter O'Toole, acteur qu'adolescent j'adulais, pas seulement pour son interprétation
inoubliable de Laurence d'Arabie, mais aussi pour celle de Lord Jim et quelques années plus tard pour sa prestation hallucinée dans "la Nuit des généraux".